Albert Boisjoly (1901-1951) (Photo tirée d'une mosaïque de portraits des membres de l'École littéraire de Montréal en 1921, publiée dans Richard Foisy, L'Arche) |
Tout est calme, la nuit vêt sa robe de veuve,
Avec pour tout joyau qu'un vieux médaillon d'or.
Pas de bruit, le silence, immense comme un fleuve,
Submerge la cité paisible qui s'endort.
Un homme, tout-à-l'heure, a passé dans la rue,
Furtif comme un larron qui craint d'être surpris.
La lune, sous un pli de voile, est disparue
En barbouillant de noir les toits vagues et gris.
Pas de bruit, tout est calme. Et, pourtant, le poète,
Malgré le plomb brutal qui fait battre ses yeux,
Attablé, le dos rond, mille feux dans la tête,
Range des mots divins sur des rythmes soyeux.
Il est là, maigre et pâle, âme en proie à la fièvre,
Pauvre dieu que la chair humanise et retient
Entre des horizons ainsi qu'un oiseau mièvre
Dans la cage où son chant à peine le soutient.
Pas de bruit, cependant, son cœur est une forge
Pleine de cris stridents, de battements de fer ;
Et son haleine en feu brûle et crispe sa gorge
Comme sous un baiser corrosif de l'enfer.
Il arrache à son âme un lambeau d'harmonie,
Souffre, penche son front où bouillonne l'esprit,
Rêve, ajoute un nouveau fleuron à son génie,
Et s'endort au moment où l'aurore fleurit.
Oh ! la nuit, c'est l'instant du jour le plus sublime
Pour le poète épris de sa divinité,
C'est l'heure solennelle et le moment ultime
Où son rêve s'étend dans toute sa beauté.
Albert Boisjoly* (1925)
Tiré de : Les soirées de l'École littéraire de Montréal, Montréal, 1925, p. 324-325.
* Albert Boisjoly est né à Montréal le 8 février 1901, d'Ulric Boisjoly, cordonnier et chauffeur de tramway, et d'Anna Martineau. On ne dispose jusqu'à présent d'aucune information quant aux institutions d'enseignement qu'il a fréquentées. Il pratiqua la profession de comptable.
Il fit preuve d'un talent littéraire précoce. Dès l'âge de seize ans, ses poèmes étaient acceptés par divers journaux. En 1921, à l'âge d'à peine vingt ans, il fut recruté par Englebert Gallèze et admis au sein de l'École littéraire de Montréal, dont il fut le cadet et le secrétaire en 1923-1924.
On retrouve de ses poésies dans les journaux et périodiques suivants, à partir de 1917 jusqu'en 1948 : Le Passe-Temps ; Le Canard ; Le Devoir ; Le Pays ; Le Bulletin des agriculteurs ; Le Droit ; Le Canada.
Il fit preuve d'un talent littéraire précoce. Dès l'âge de seize ans, ses poèmes étaient acceptés par divers journaux. En 1921, à l'âge d'à peine vingt ans, il fut recruté par Englebert Gallèze et admis au sein de l'École littéraire de Montréal, dont il fut le cadet et le secrétaire en 1923-1924.
On retrouve de ses poésies dans les journaux et périodiques suivants, à partir de 1917 jusqu'en 1948 : Le Passe-Temps ; Le Canard ; Le Devoir ; Le Pays ; Le Bulletin des agriculteurs ; Le Droit ; Le Canada.
Il prit part à certains débats et polémiques littéraires et politiques. Nationaliste, il a notamment critiqué sévèrement les adeptes du parti libéral dans un poème, Le Héros, paru dans Le Devoir en 1944 (voir ci-dessous). Dans les journaux et périodiques, l'orthographe de son patronyme s'écrit indifféremment Boisjoly ou Boisjoli.
Durant les années 1940, il avait fondé les Éditions Boisjoly, qui publiaient des romans en format bon marché signés par lui-même ou par d'autres auteurs.
Albert Boisjoly est mort à Montréal le 10 novembre 1951. Il avait épousé Alice Bourgeois le 7 septembre 1920, à la paroisse Saint-Édouard de Montréal.
(Sources : La Patrie, 20 novembre 1951 ; Ancestry.ca ; Germain Beaulieu, Nos immortels, Montréal, Éditions Albert Lévesque, 1931, p. 41-47).
Il est à signaler que, malgré son implication dans la mythique École littéraire de Montréal, malgré aussi la reconnaissance dont son œuvre littéraire fut l'objet par ses pairs écrivains dont Albert Laberge (excusez du peu !), Albert Boisjoly est totalement absent des manuels et dictionnaires de littérature québécoise. C'est comme s'il n'avait pas existé. Le dossier présenté ici-même par les Poésies québécoises oubliées constitue donc le premier effort de rassemblement des éléments d'information sur sa vie et son œuvre, afin que son souvenir puisse remonter à la surface :
Mosaïque de photos des membres de l'École littéraire de Montréal en 1921. Albert Boisjoly est le numéro 11. Les autres sont : Englebert Gallèze (1) ; Alphonse Beauregard (2) ; Germain Beaulieu (3) ; Roger Maillet (4) ; Victor Barbeau (5) ; Joseph-Arthur Lapointe (6) ; Albert Dreux (7) ; Albert Laberge (8) ; Henri Letondal (9) ; Ubald Paquin (10) ; Isaïe Nantais (12) ; Berthelot Brunet (13). (Source : Richard Foisy, L'Arche : un atelier d'artistes dans le Vieux-Montréal) |
Ce portrait d'Albert Boisjoly à l'occasion de son décès par l'écrivain Albert Laberge constitue un vibrant hommage à sa valeur littéraire comme à sa personne. Toutefois, Laberge fait erreur quand il affirme que le poème de Boisjoly sur l'École littéraire de Montréal, paru dans Le Devoir en juin 1944 (et que l'on peut lire ci-dessous), serait la dernière œuvre qu'il aurait publiée. Il publia des poèmes ou des articles dans les journaux au moins jusqu'à 1948. (Source : La Patrie, 20 novembre 1951 ; BANQ) |
Albert Boisjoly, fils de cordonnier et de chauffeur de tramway, a fait preuve d'un talent poétique précoce. Âgé d'à peine 18 ans, il publiait dans le journal Le Pays du 16 août 1919 ce poème d'amour adressé à « Alice B. », qu'il épousera un an plus tard. (Source : BANQ ; cliquer sur l'image pour l'agrandir) |
En novembre 1921, peu après son admission au sein de l'École littéraire de Montréal, Albert Boisjoly prit part à un souper chez le critique littéraire Victor Barbeau. Parmi les convives dont la plupart sont des membres de l'École, Claude-Henri Grignon et Olivar Asselin, invité d'honneur. (Le Soleil, 30 novembre 1921 ; BANQ; cliquer sur l'image pour l'agrandir) |
Le 12 mai 1923, la dernière séance de l'École littéraire de Montréal eut lieu à la résidence d'Albert Boisjoly, qui habitait alors avec son épouse sur la rue Berri, à Montréal. (Source : Le Canada, 12 mai 1923 ; BANQ ; cliquer sur l'image pour l'agrandir) |
Réélection d'Albert Boisjoly au poste de secrétaire de l'École littéraire de Montréal. (Le Devoir, 25 octobre 1923 ; BANQ ; cliquer sur l'image pour l'agrandir) |
Extrait d'un article paru dans le numéro de janvier 1932 de La Revue moderne. L'article a pour titre : "L'École littéraire de Montréal". Pour l'article complet, cliquer ICI. |
Dans son édition du 6 décembre 1923, La Presse fit état d'une soirée tenue chez Albert Boisjoly et son épouse, qui habitaient alors rue Berri à Montréal. (Source : BANQ : cliquer sur l'image pour l'agrandir) |
En 1931, Germain Beaulieu publia sur son confrère
de l'École littéraire de Montréal, Albert Boisjoly, un
profil littéraire aux accents humoristiques dans son
livre Nos immortels. Cliquer sur cette image pour
consulter ce profil :
Caricature d'Alfred Boisjoly par Albéric Bourgeois, dans Nos immortels, de Germain Beaulieu. (Cliquer sur l'image pour l'agrandir) |
Ce poème satirique est une critique virulente des adeptes du parti libéral, dont les pratiques devaient choquer les convictions nationalistes et anti-conscriptionnistes d'Albert Boisjoly. (Le Devoir, 27 mai 1944 ; BANQ ; cliquer sur l'image pour l'agrandir) |
Cet entrefilet dans Le Canada du 19 novembre 1945 indique qu'Albert Boisjoly s'était alors lancé dans l'écriture et l'édition de romans populaires à bon marché. (Source : BANQ) |
Dans l'hebdomadaire Radio-Monde du 10 avril 1948, le chroniqueur René O. Boivin (qui signe "ROB") fait état d'une polémique à laquelle lui-même et Alfred Boisjoly ont pris part au sujet d'une pièce de théâtre intitulée La mort de Lucrèce. La polémique semble avoir été particulièrement virulente, sinon violente. (Source : BANQ ; cliquer sur l'image pour l'agrandir) |
Dans les éditions du journal Le Canada des 25 et 31 mai 1948, l'écrivain Pierre Baillargeon et Albert Boisjoly ont eu un sympathique échange en vers, dans le cadre d'une polémique qui était probablement encore celle à propos de la pièce La mort de Lucrèce. (Source : BANQ ; cliquer sur l'image pour l'agrandir) |
Notice nécrologique dans La Presse, 12 novembre 1951. (Source : BANQ) |
Durant les dernières années de sa vie, Albert Boisjoly habitait le rez-de-chaussée de cet immeuble situé au 4220 rue Messier, dans le quartier du Plateau-Mont-Royal, à Montréal. (Source : Google Maps) |
Des recherches dans les registres paroissiaux
ont permis d'établir les dates de naissance et
de mariage d'Albert Boisjoly. Ci-dessous, son
extrait de baptême de la paroisse Saint-
Jacques de Montréal, puis l'acte de mariage
à la paroisse Saint-Édouard de Montréal.
(Source : Ancestry.ca ; cliquer sur
(Source : Ancestry.ca ; cliquer sur
les images pour les agrandir) :
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