dimanche 6 octobre 2019

L'alouette

Octave Crémazie (1827-1879)

(Source : Oeuvres complètes
d'Octave Crémazie
, 1882)




                                    Voici le jour ; n'entends-tu pas
                                    le chant de l'alouette qui s'élève
                                    sur la rive ?
                                                   SHAKESPEARE


                Alouette
                Gentillette,
                Ta voix jette
   Chaque matin un chant si radieux,
                Si sonore
                Que l'aurore
                Doute encore
   S'il naît sur terre ou s'il descend des cieux.

         Dans le bois solitaire,
         D'un chant si mélodieux
         Le rossignol ton frère
         Jette les sons joyeux.
         Toi, sur la rive humide
         Où s'arrêtent les flots,
         Ta voix douce et rapide
         Vient consoler nos maux.

         C'est pour toi que l'aurore
         Vient dissiper la nuit ;
         Pour toi le soleil dore
         Chaque fleur, chaque fruit ;
         C'est pour toi que la rose,
         Ouvrant ses yeux pourprés,
         Répand, à peine éclose, 
         Ses parfums dans les prés.

         Car ta voix matinale,
         Saluant le soleil 
         Et la fleur virginale
         À son premier réveil,
         Répand dans la nature
         Tous ses brillants accords,
         Et se mêle au murmure
         Des vagues sur nos bords.

         Quand la nuit de son voile
         Assombrit l'horizon,
         À la première étoile
         Tu redis ta chanson ;
         Ainsi, douce alouette,
         Ta voix chante toujours, 
         Et la mort seule arrête
         Tes chants et tes amours.

   Au matin de nos jours, quand l'avenir en fleurs
   Étale devant nous ses riantes couleurs,
         Nous trouvons dans notre âme,
   Pour saluer la vie, un chant pur et joyeux,
   Car le bonheur alors brille devant nos yeux
         Comme un rayon de flamme. 

   Mais, comme l'alouette, à l'approche du soir,
   Brisés par la douleur, trompés dans leur espoir,
         Nos cœurs pleins de tristesse
   Ne trouvent plus, hélas ! leurs accents du matin,
   Car ils ont vu se perdre, aux ronces du chemin,
   Les chants et les vertus qui charmaient leur jeunesse. 

                       Octave Crémazie* (Québec, 3 février 1858)



Tiré de : Octave Crémazie, Œuvres complètes, Montréal, C.O. Beauchemin & Fils Libraires-Imprimeurs, 1882, p. 139-141. 

*  Octave Crémazie est né à Québec le 16 avril 1827, de Jacques Crémazie, marchand, et de Marie-Anne Miville. 
    De 1836 à 1843, il fit ses études classiques au Petit séminaire de Québec. En 1844, il fonda avec son frère Joseph une librairie sur la Côte-de-la-Fabrique, à Québec. Il fit des voyages d'affaires en France en 1851, 1854 et 1856, mais il s'intéressa surtout à la littérature et négligea peu à peu son commerce. 
   Il fut, en décembre 1847, membre-fondateur de l'Institut canadien de Québec, dont il fut, en 1849, nommé secrétaire-archiviste. Il collabora, en 1861-1862, à la revue Les Soirées canadiennes. De 1849, il publia des poésies dans divers journaux ; ses poèmes ont été rassemblés dans ses Oeuvres complètes, qui furent publiées en 1882, soit trois ans après sa mort.
   Il fut acculé à la faillite en 1862, et suite à une accusation de fabrication de faux billets financiers, il s'exila en France cette même année. Il ne revint plus jamais au Québec. 
   Octave Crémazie est mort au Havre (France) le 16 janvier 1879. En 1906, un monument à sa mémoire fut inauguré en grandes pompes au carré Saint-Louis, à Montréal, suite à une souscription initiée par le poète Louis Fréchette
(Source principale : Dictionnaire des œuvres littéraires du Québec, tome 1, Montréal, éditions Fides, 1980, p. 549).  


Le poème L'alouette, ci-haut, est tiré des
Œuvres complètes d'Octave Crémazie. On
peut trouver ICI un rare exemplaire de
l'édition originale, ou en télécharger ICI
gratuitement un exemplaire.

(Cliquer sur l'image pour l'agrandir)

Portrait d'Octave Crémazie paru dans le journal
L'Opinion publique, le 10 avril 1873, à l'occasion
d'une conférence donnée par Louis Fréchette à
Montréal sur les poètes d'ici. Cette gravure le
montre à l'âge de 25 ans.

(Source : Odette Condemine, Octave Crémazie,
Montréal, éditions Fides, 1980, p. 65)

Plaque commémorative réalisée par Alonzo Cinq-Mars, artiste-
sculpteur et aussi poète (les Poésies québécoises oubliées ont
présenté son poème Illusion, et apposée en 1932 par la Société
des Poètes à l'entrée du 42 Côte-de-la-Fabrique, à Québec, qui
fut occupé par la librairie J. & O. Crémazie de décembre 1847
à novembre 1862. Jusqu'en 1858, la famille Crémazie a habité
l'étage supérieur de l'édifice construit en 1844 et qui existe
toujours, l'aspect extérieur n'ayant guère changé depuis le
temps où Octave Crémazie y œuvrait et y habitait.

(Source : Ville de Québec ; cliquer sur l'image pour l'agrandir)

Monument Octave Crémazie au carré Saint-Louis,
à Montréal. L'ouvrage, réalisé par le sculpteur
Louis-Philippe Hébert, a été dévoilé en 1906
 lors d'une imposante cérémonie présidée par le
poète Louis Fréchette, suite à une souscription
publique ayant duré plus d'une décennie.

(Source : Image Montréal ;
cliquer sur l'image pour l'agrandir)

En 1908, la Société Saint-Jean-Baptiste de Québec
fit l'acquisition à perpétuité du terrain où Octave
Crémazie fut inhumé en 1879. Ce projet put être
réalisé grâce aux efforts du juge et  poète Gonzalve
 Desaulniers
, dont les Poésies québécoises oubliées
ont présenté les poèmes Sous les branches et
La voix du golfe. L'inauguration de ce monument
au cimetière d'Ingouville (France) eut lieu le 3
novembre 1912, en présence de personnalités
éminentes de France et du Québec.

(Source : Odette Condemine,
Octave Crémazie, op. cit., p. 244 ;
cliquer sur l'image pour l'agrandir)

En 1980, Odette Condemine publia ce volume
contenant une abondante iconographie sur
Octave Crémazie et son époque. On peut
en trouver ICI et ICI de rares exemplaires.

(Cliquer sur l'image pour l'agrandir)


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