Jean-Baptiste Gagnon (1893-1956) (Source : La Revue moderne, janvier 1924) |
C'est pendant la guerre. Je
reçois le cadeau d'un réveil-matin
qui sonne en cadence...
À mon sombre taudis Orphée est parvenu.
À mon sombre taudis Orphée est parvenu.
Ces dieux d'antan sont sans scrupule
Et savent dévoiler l'endroit le moins connu,
Entrant même par la pendule !
Sans doute il avait vu le vieux Père Noël
Se glisser dans les cheminées ;
Et charitablement il descendit du ciel
Pour y scander mes destinées.
Et depuis ce jour-là, sous l'aiguille d'argent
Qui mesure toujours ma vie,
Il habite avec moi sous mon toit d'indigent,
Pour m'égayer à faire envie.
Rêveur ou sautillant, c'est un joyeux luron
Qui ne babille qu'en musique :
Valse ou quadrille, il joue un air qu'on danse en rond,
Peut-être même un air classique.
Talisman saint de bon aloi ;
Inlassable joueur d'une lyre invisible,
Il n'a qu'un seul défaut qui me rend irascible :
C'est de s'éveiller avant moi.
C'est un original à renverser le monde
Avec sa lyre au timbre d'or.
Il est debout quand de fatigue je succombe ;
Si tôt que je m'éveille il dort.
Avant que l'aurore ait ouvert ma persienne,
Il fait son concert fanfaron ;
Enfin ! pour s'éveiller la main musicienne
Vaut encore mieux que le clairon !
Pourvu que dans ma vie il apporte le rêve,
Je veux toujours, toujours l'avoir ;
Et ne la hâte pas : elle est déjà si brève
Et le matin si près du soir.
Jean-Baptiste Gagnon* (22 avril 1916)
Tiré de : Jean-Baptiste Gagnon, Coups de scalpel, Montréal, 1923, p. 87-89.
Pour en savoir plus sur Jean-Baptiste Gagnon, voyez la notice biographique et les documents sous son poème Le tombeau des rêves.
Le poème Pendule musicienne, ci-haut, est tiré du recueil Coups de scalpel, de Jean-Baptiste Gagnon, dont on peut se procurer de très rares exemplaires ICI et ICI. (Cliquer sur l'image pour l'agrandir) |
Très rigolo un médecin chirurgien avec le sens de l'humour,c'est plutôt rassurant.
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