Jean Dollens, nom de plume d'Estelle Bruneau (1910-1953) (Source : Société d'histoire de Sherbrooke) |
Dans la nuit morte et langoureuse,
L'âme mystique et douloureuse
Contemple au fond de l'infini,
De ses yeux pensifs et livides,
L'abîme sombre des coeurs vides
Dont l'idéal s'est endormi.
L'âme a chanté sur une lyre
Les purs sanglots de son délire
Sur le sépulcre du désir.
Car son regard n'a pas su lire
Qu'un amour, un coeur, un sourire
Sont des fleurs qu'on ne peut saisir.
Roses de sang, d'azur, de rêve
Dont le troublant parfum s'élève
Sur le passé qui veut mourir...
Âmes dont les fleurs des ténèbres
Ouvrent leurs calices funèbres
Aux longs baisers du souvenir...
Et ces âmes dont l'esprit souffre
Respirent le poison d'un gouffre
Ouvert sous leur regard éteint,
Car les espoirs à l'agonie
Ont rencontré l'âpre ironie
Des mots frappés par le destin.
* * *
En fuyant la haine implacable
Des puissants, des inexorables,
Les âmes s'en vont dans la nuit,
Écouter les voix fraternelles
Triomphantes et solennelles
Qui versent le calme et l'oubli.
Perdus au sein de l'ombre noire,
Les esprits rêvent de victoire
Sur leur morne captivité.
Car la voix des âmes révèle
La nostalgie universelle
Gémissant dans l'obscurité...
Estelle Bruneau*, alias Jean Dollens (1938)
Tiré de : Jean Dollens, Nostalgies, Sherbrooke, La Tribune Ltée, 1938, p. 132-133.
* Estelle Bruneau est née à Sherbrooke le 20 janvier 1910, d'Oscar Bruneau, agent d'assurances, et de Clotilde Champoux. Elle fit ses études à Sherbrooke, puis fut collaboratrice au journal La Tribune et au Messager de Saint-Michel, sous les pseudonymes de « Jean Dollens » et de « Guynemer ». Ses articles furent également publiés dans d'autres journaux et périodiques, comme Le Bien public (Trois-Rivières), L'Avenir du Nord (Saint-Jérôme), etc.
Elle publia trois romans, La lumière retrouvée (1933) ; L'ombre du passé (1935) ; Sous la griffe de Moscou (....) et un recueil de poésies, Nostalgies (1938).
Dans sa préface à Nostalgies, le poète Alfred Desrochers a écrit :
« Jean Dollens, dont les journaux d'avant-garde publient fréquemment la prose vigoureuse et volontiers belliqueuse, entr'ouvre aujourd'hui le musée secret de ses NOSTALGIES aux amants de la poésie. Ce sera une révélation pour plusieurs, car on n'y retrouvera plus l'esprit curieux de théories sociales, de systèmes politiques et de spéculations philosophiques. Au lieu de cela, un coeur meurtri par la vie, un coeur selon le mot de Verlaine : "qui se répand, plutôt qu'il ne s'épanche". [...] La plupart de ces vers décrivent, en même temps que l'évolution d'une âme et d'un coeur, celle d'une pensée de jour en jour plus affinée, qui ne connaît de bornes que l'amour, la curiosité et l'orgueil ― ces trois frontières de l'art, dont l'autre est l'infini ».
Dans sa préface à Nostalgies, le poète Alfred Desrochers a écrit :
« Jean Dollens, dont les journaux d'avant-garde publient fréquemment la prose vigoureuse et volontiers belliqueuse, entr'ouvre aujourd'hui le musée secret de ses NOSTALGIES aux amants de la poésie. Ce sera une révélation pour plusieurs, car on n'y retrouvera plus l'esprit curieux de théories sociales, de systèmes politiques et de spéculations philosophiques. Au lieu de cela, un coeur meurtri par la vie, un coeur selon le mot de Verlaine : "qui se répand, plutôt qu'il ne s'épanche". [...] La plupart de ces vers décrivent, en même temps que l'évolution d'une âme et d'un coeur, celle d'une pensée de jour en jour plus affinée, qui ne connaît de bornes que l'amour, la curiosité et l'orgueil ― ces trois frontières de l'art, dont l'autre est l'infini ».
Estelle Bruneau avait épousé Frank Atwood le 19 décembre 1929, avec qui elle a vécu quelques temps à Manchester (New Hampshire), pour revenir vivre avec ses parents à Sherbrooke, dans un édifice du centre-ville nommé le « Monument national ».
Estelle Bruneau est morte à Sherbrooke le 9 septembre 1953.
(Sources : Dictionnaire des oeuvres littéraires du Québec, tome 2, Montréal, éditions Fides, 1981, p. 774 ; Dictionnaire Guérin des poètes d'ici de 1606 à nos jours, Montréal, 2005, p. 438 ; archives de La Tribune).
(Sources : Dictionnaire des oeuvres littéraires du Québec, tome 2, Montréal, éditions Fides, 1981, p. 774 ; Dictionnaire Guérin des poètes d'ici de 1606 à nos jours, Montréal, 2005, p. 438 ; archives de La Tribune).
Nostalgies, recueil de Jean Dollens, nom de plume d'Estelle Bruneau, d'où est tiré le poème La voix des âmes, ci-haut. On peut en trouver de rares exemplaires ICI et ICI. |
Recension du recueil Nostalgies dans Le Devoir du 2 avril 1938. (Source : BANQ ; cliquer sur l'image pour l'agrandir) |
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