vendredi 30 novembre 2018

L'œil

Olivier-Victor Bourbeau-Rainville (1873-1916)

(Source : André Couture, Les doux fantômes
d'un grand regret
, Gatineau, Société
d'histoire de l'Outaouais, 2008)




   Au firmament de l'âme il en reçoit les teintes.
   Entre l'âme et l'espace, au bord des cils fournis,
   L'œil est comme une étoile entre deux infinis
   Et reçoit les rayons de ces deux sources saintes.

   L'amour le fait briller comme un pur diamant,
   L'hymen en fait jaillir des lueurs triomphales,
   Le berceau le remplit de clartés idéales.
   Il agit sur les cœurs souvent comme un aimant. 

   Son regard chez l'enfant a tout l'éclat des sources,
   Il a chez le vieillard l'insondable des mers,
   Il prend aux miséreux le ton des jours amers
   Et chez l'homme méchant il a mille ressources.

   C'est le flambeau du cœur, l'astre de la raison.
   Sensible comme l'onde aux mouvements de l'âme,
   Tour à tour il s'égaie, il s'attriste, il s'enflamme,
   Il s'emplit d'idéal, d'extase et d'oraison.

   Miroir de la nature, il est baigné par elle,
   Il porte, d'âge en âge, au fond des cœurs charmés,
   Les baisers de l'aurore et des regards aimés,
   L'éternelle splendeur de la voûte éternelle.

   Il lit au fond de nous comme un livre ouvert. 
   Au moment du danger c'est lui qui nous regarde,
   Témoin silencieux, de l'âme il a la garde,
   Et par le repentir repeuple un cœur désert. 

   Entre les cils mourants il laisse couler l'âme,
   Sa lumière vacille en flambeau consumé.
   Et quand tout est fini, quand il est refermé, 
   Il s'ouvre dans les cieux d'où lui venait sa flamme.

              Olivier-Victor Bourbeau-Rainville* (mars 1903)



Tiré de : revue Le Pays laurentien, mars 1917. 

*   Olivier-Victor Bourbeau-Rainville est né le 12 mai 1873 à Arthabaska, de Louis Rainville, avocat et protonotaire, et de Victoria Bourbeau. Après son cours élémentaire à l'école primaire de sa paroisse natale, il fit ses études classiques au Séminaire de Nicolet, où il reçut le titre de bachelier ès arts en 1895. 
   Ayant étudié le droit à l'Université Laval de Québec, il se mérita la médaille d'or du gouverneur général de même que la médaille d'argent du lieutenant-gouverneur. Il fut admis au Barreau en 1898. Il constitua à Hull un cabinet d'avocats avec T.-P. Foran. De 1908 à sa mort, il fut magistrat du district de Pontiac.
   Il s'occupa aussi de journalisme et participa à la fondation de deux journaux, La Voix de l'Outaouais et Le Pionnier canadien. Il publia dans ce dernier journal, sous la forme d'un feuilleton, un roman de mœurs, Camille Mirecourt. Il a également composé un drame en vers, Dollard des Ormeaux, qui fut interprété sur scène à Montréal pour la première fois en 1911, et qui connut un certain succès. Il est également l'auteur de nombreux poèmes dispersés dans divers journaux et périodiques, dont la revue Le Pays laurentien, à laquelle il collabora dès son premier numéro.
   Atteint de tuberculose, Olivier-Victor Bourbeau-Rainville est mort à Sainte-Agathe-des-Monts le 23 septembre 1916. Il avait épousé Éliza, fille de Laurent-Olivier David, le 10 mai 1898.
(Sources : Le Pays laurentien, octobre 1916, p. 274 ; Dictionnaire des œuvres littéraires du Québec, tome 1, Montréal, éditions Fides, 1980, p. 377)


Le poème L'œil, ci-haut, de Victor-Olivier
Bourbeau-Rainville, est tiré du numéro de
mars 1917 de la revue Le Pays Laurentien.

(Cliquer sur l'image pour l'agrandir) 

Olivier-Victor Bourbeau-Rainville a composé
diverses pièces de théâtre, dont le drame
Dollard des Ormeaux, produit sur scène à
Montréal en 1911 et qui connut un certain 
succès. Cliquer ICI pour consulter ou
télécharger gratuitement cette œuvre.

Maison natale d'Olivier-Victor Bourbeau-Rainville au 19, rue Laurier Ouest,
à Arthabaska. Henri d'Arles y est également né trois ans auparavant. Il y 
eut entretemps changement de propriétaires de la maison.
 
Article paru le 29 septembre 1916 dans L'Avenir du Nord (Saint-Jérôme). 

Article paru dans La Presse du 25 septembre 1916.


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