Albert Ferland (1872-1943) (Source : Paul Wyczynski, Louis-Joseph Béliveau et la vie littéraire de son temps, Montréal, éditions Fides, 1984, p. 103). |
Passant, les pins ! Le mont s'emplit de leur nuit verte.
Ici, nombreux et forts, les a groupés l'amour.
Vois. De leurs bras obscurs ils déchirent le jour.
La majesté des pins à ton âme est offerte.
Regarde ces géants profilés sur le ciel.
Hommage à ces vivants dont nul ne sait l'histoire !
Vois leur beauté. Muet, vois s'accuser leur gloire,
Quand, plus large, s'empourpre et tombe le soleil.
Contemple. Devant toi, par leur tailles célèbres,
Sont les pins solennels et sombres de chez nous,
Les grands pins ténébreux dont nous sommes jaloux,
Prompts à faire rêver qui marche en leurs ténèbres.
Ardent, le jour est mort... Déjà, sur les pins noirs,
Le flot mélodieux de l'air fraîchi circule.
Ces bruits !... les entends-tu, passant du crépuscule ?...
C'est le chant que les pins prolongent dans les soirs.
Rêveur, suspends ton âme au chant des pins poètes,
Toujours chantant, toujours vibrant quand l'homme dort.
Écoute la chanson qu'en la terre du Nord
Les pins chantent, baignés par les nuits violettes !
Albert Ferland* (juin 1906)
Tiré de : Albert Ferland, Le Canada chanté, livre deuxième, Montréal, L'auteur éditeur, 1909, p. 17-18.
* Albert Ferland est né à Montréal le 23 août 1872, d'Alfred Ferland et de Joséphine Hogue. Ayant refusé d'entreprendre des études classiques, il travailla tour à tour dans une épicerie, une étude d'avocat, à l'imprimerie Beauchemin et dans la fabrique de son père, avant d'enseigner le dessin et la gravure, notamment au Monument-national. Autodidacte, il parvint en quelques années à acquérir une culture considérable.
Pendant ce temps, publia des poèmes dans les périodiques Le Samedi et Le Monde Illustré. Il participa en 1895 à la fondation de l'École littéraire de Montréal, dont il fut le secrétaire de 1900 à 1903, puis le président en 1904. La même année, il publia l'unique numéro de la Revue de l'art. Il est l'auteur de quatre recueils de poésies : Mélodies poétiques (1893) ; La consolatrice (1898) ; Femmes rêvées (1899) ; Le Canada chanté (en 5 volumes, parus de 1908 à 1946).
Vers 1910, il décrocha un emploi comme dessinateur pour le service postal. Mais lorsque des coupures budgétaires provoquèrent sa mise à pied, il se vit plongé dans la misère. Comme le raconte son biographe Gaëtan Dostie : « Quand on le força à prendre sa retraite, le 28 janvier 1941, à 69 ans, il supplia qu'on prolonge son emploi car il n'avait droit à aucune pension. L'indigence fut son lot. Il dut quêter ses médicaments souventes fois. En novembre 1943, il attrape une grippe dont il ne se remettra pas ».
Albert Ferland est mort à Montréal le 9 novembre 1943. Il avait épousé en 1894 Eugénie Chapleau.
(Sources : Gaëtan Dostie et Jean-Guy Paquin, Albert Ferland, 1872-1943, Du pays de Canard Blanc Wâbininicib au plateau Mont-Royal, Montpellier, Écrits des Hautes-Terres, 2003 ; Dictionnaire Guérin des poètes d'ici de 1606 à nos jours, Montréal, éditions Guérin, 2005, p. 508 ; Dictionnaire des oeuvres littéraires du Québec, Montréal, éditions Fides, 1980, p. 478 ; La Tribune, 11 novembre 1943).
D'Albert Ferland, les Poésies québécoises oubliées ont également présenté : Retour des corneilles et Au gré de l'onde.
Le poème Les pins qui chantent, ci-haut, est tiré du livre deuxième du recueil Le Canada chanté, d'Albert Ferland. On peut ICI le télécharger gratuitement. (Cliquer sur l'image pour l'agrandir) |
Cet ouvrage consacré à l'artiste remarquable qu'était Albert Ferland est paru en 2003. On peut trouver ICI, ICI, ICI, ICI et ICI de rares exemplaires de ce livre qui contient de nombreuses poésies de Ferland. (Cliquer sur l'image pour l'agrandir) |
Cette illustration par l'auteur orne également le poème Les pins qui chantent, d'Albert Ferland, dans le tome deuxième de son recueil Le Canada chanté. (Cliquer sur l'image pour l'agrandir) |
Portrait d'Albert Fernand dessiné par Émile Vézina, paru dans le journal Le Nationaliste du 5 mars 1911. (Source : BANQ ; cliquer sur l'image pour l'agrandir) |
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Triste est sa fin de vie dans la misère, avec toutes ses belles œuvres qu'il a laissé.
RépondreSupprimerEn effet, c'est triste et même scandaleux. Il avait tellement donné de lui-même pour que la culture de chez nous soit soutenue et prenne son envol. Mais le faire sortir de l'oubli est un bon moyen de réparer l'injustice.
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