Louis-Joseph Béliveau (1874-1960) (Source : Paul Wyczynski, Louis-Joseph Béliveau et la vie littéraire de son temps) |
Comme un voile de deuil qui couvre deux beaux yeux,
La nuit cache, ce soir, le globe d'or des cieux.
Et je prête l'oreille... En vain mon œil regarde :
Tout dort ! Et seul mon souffle infecte ma mansarde
Où je veille en priant,
Où je prie en chantant !
Je nargue la douleur qui vient, toute oppressée,
Faire languir ma veille, à cette heure avancée.
Si mon être faiblit, j'ai pour me soutenir
Mon crucifix, ma lyre ! Et votre souvenir
Me fait chérir, amie,
Ces heures d'insomnie.
Que souffrir est léger quand la foi du chrétien
L'avertit que son Dieu est encore son soutien !
Qu'importe la douleur si l'on songe au calvaire ?
Puis, qu'il fait bon d'aimer quand on est solitaire.
Oh ! veiller est plus doux
Pour qui souffre à genoux !
Si la « Brise des nuits » souffle à votre croisée,
« Ouvrez vos blancs rideaux » pour saisir ma pensée ;
Aspirez ses parfums par l'âme et le cœur :
Ils vous portent l'amour, la joie et le bonheur...
Priez bien pour le barde
De la pauvre mansarde !
Louis-Joseph Béliveau* (1896)
Tiré de : Paul Wyczynski, Louis-Joseph Béliveau et la vie littéraire de son temps, Montréal, éditions Fides, 1984, p. 62. Le poème est initialement paru dans Le Monde illustré du 1er août 1896.
* D'ascendance acadienne, Louis-Joseph Béliveau est né à Montréal le 21 janvier 1874, de Simon Béliveau et de Mélina DesRoches. Orphelin de père dès l'âge de neuf ans, il entra le 3 septembre 1888 comme pensionnaire au Mont-Saint-Louis, qu'il quitta l'année suivante pour s'inscrire au Collège de Montréal. Il revint toutefois au Mont-Saint-Louis et y fit son cours de commerce jusqu'en 1893, en plus d'y présider une Académie littéraire.
Après ses études, il exerça divers petits métiers jusqu'à 1896, où il fonda, rue Notre-Dame à Montréal, la Librairie ancienne et moderne. Intéressé par la littérature, il fit alors partie de l'École littéraire de Montréal et composa des poèmes dont plusieurs furent publiés dans Le Monde illustré.
Après l'échec commercial de sa librairie, il travailla durant une brève période de temps comme publiciste pour le journal La Patrie, puis s'établit aux États-Unis en 1911, où il fonda deux journaux éphémères, La Feuille d'érable, en 1914 à New Bedford (Massachusetts), et La Liberté à Providence (Rhode Island). Il fut par la suite publiciste et agent de ventes pour le journal L'Indépendant, de Fall River (Massachusetts).
Revenu au Québec en 1921, il travailla comme publiciste pour les journaux Le Soleil, La Patrie, Le Petit Journal et Radiomonde.
Comme écrivain, il composa en 1892-1893 un cahier de poèmes, Naïveté et premières erreurs. Il publia également des textes en prose, dont Si j'étais poète, qui fut remarqué par la critique (voir ce texte ci-dessous). Il recourait souvent à un nom de plume, Ludo.
À l'École littéraire de Montréal, il était considéré comme un « gentil animateur de lettres », et fut à ce titre très apprécié et estimé de ses collègues poètes et écrivains, qui, lors de son premier mariage, en septembre 1897, lui ont offert un Album souvenir qui contient notamment un poème autographe d'Émile Nelligan, Salons allemands.
En 1955, il prit sa retraite. Peu de temps après, il fut hospitalité à l'hôpital Saint-Joseph-de-Rosemont.
Dans l'ouvrage biographique et anthologique qu'il lui a consacré, Paul Wyczynski a écrit : « Louis-Joseph Béliveau est un homme aux multiples visages : jeune enthousiaste des lettres, libraire-éditeur, commerçant à l'occasion, journaliste, citoyen dévoué à la francophonie, bon père de famille, poète aux moments de loisirs... Comme la plupart des jeunes montréalais de la fin du XIXe siècle, il souhaitait ardemment le renouvellement de la vie culturelle et l'amélioration de la situation économique des Canadiens français au pays et aux États-Unis ».
Louis-Joseph Béliveau est mort à Montréal le 2 août 1960. Il avait épousé en première noces, en 1897, Bernadette Archambault, qui mourut en 1906. Trois ans plus tard, il épousa en secondes noces Anna Belleville.
(Sources : Paul Wyczynski, Louis-Joseph Béliveau et la vie littéraire de son temps, Montréal, éditions Fides, 1984 ; Dictionnaire des auteurs de langue française en Amérique du Nord, Montréal, éditions Fides, 1989, p. 104 ; Dictionnaire Guérin des poètes d'ici de 1606 à nos jours, Montréal, éditions Guérin, 2005, p. 90).
Sous son pseudonyme de « Ludo », Louis-Joseph Béliveau publia dans Le Monde illustré du 29 juillet 1893 cet article, Si j'étais poète, qui fut alors remarqué par la critique. (Source : BANQ ; cliquer sur l'image pour l'agrandir) |
Notice nécrologique parue dans La Presse du 3 août 1960. (Source : BANQ ; cliquer sur l'image pour l'agrandir) |
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