mardi 24 octobre 2017

Espoir renouvelé

Jean Charbonneau (1875-1960)
(Source : Pierre de Grandpré, Histoire
de la littérature française du Québec
,
tome 2, Montréal, Beauchemin, 1968)


    
    Un soleil printanier a surgi de l'aurore.

    Tout est calme alentour et tout repose encore.
    Les toits se détachant d'un mont silencieux,
    Dans ce large décor réjouissent les yeux. 
    La sente des grands bois touffus où je chemine,
    Accueillante et fleurie, à l'instant s'illumine
    Et s'éveille à l'appel d'un matin plein d'éclat. 
    Comme pour me griser, un parfum délicat
    S'exhale tout à coup de toutes les fleurs blanches
    Qui pendent mollement aux agrafes des branches.
    Le printemps inspiré chante par ses oiseaux. 
    Des voix viennent de loin et troublent les ruisseaux.
    Des vols inaperçus frissonnent dans les hêtres ; 
    Un rayon matinal envahit les fenêtres. 

    Toute cette clarté tombe du firmament,
    Éblouit mes regards troublés en ce moment,
    Et la terre renaît plus ardente à la vie.
    C'est l'existence calme, heureuse, sans envie ; 
    C'est la fête du jour, c'est la fête du ciel ; 
    Il monte comme un cri d'amour universel
    Qui me fait oublier soudain les ans mauvais : 
    C'est le triomphe, c'est le règne de la paix. 

    Imite la saison que le soleil accueille
    Avec amour. Vis, pense, et sur la route cueille
    Tout ce que la nature aimante a de nouveau.
    Comble ton coeur avide et remplis ton cerveau ; 
    Entends chanter les voix qui brusquement surgissent,
    Et fais que tes regards étonnés se remplissent
    Des blondes visions si pleines de fraîcheurs. 
    Exalte maintenant les célestes blancheurs,
    Les enivrants parfums des rosiers et des mousses.
    Que la brise t'emporte en ses ailes si douces
    Dans la splendeur irrésistible du matin
    Qui, traçant l'avenir, éclaire ton chemin. 

    Poète au front pensif dont les fibres tressaillent,
    Souviens-toi que les forts sont de ceux qui travaillent ! 
    Ne désespère pas du but que tu poursuis :
    Des jours plus lumineux viennent après les nuits. 
    Sois enthousiasmé par un divin délire ; 
    Mêle ta voix sonore aux accents de ta lyre,
    Afin que, triomphale, et sans craindre le Temps, 
    Ton oeuvre se retrempe à d'immortels printemps ! 

                               Jean Charbonneau (1923)

Tiré de : Jean Charbonneau, Les Prédestinés, Montréal, éditions Beauchemin, 1923, p. 90-92. 

Pour en savoir plus sur Jean Charbonneau, cliquer ICI


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Dédicace manuscrite de Jean Charbonneau dans son
dernier recueil de poésies, Tel qu'en sa solitude (1940).
(Collection Daniel Laprès ; cliquer sur l'image pour l'agrandir)

Jean Charbonneau a notamment publié deux études littéraires, 
dont Des influences françaises au Canada, ouvrage en trois tomes 
parus en 1916, 1918 et 1920 et couronné par l'Académie française,
et, en 1935, un essai sur l'École littéraire de Montréal, dont il fut un
fondateur. Pour la liste des autres publications de Charbonneau, cliquer ICI.
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