La rivière Richelieu et une partie du mont Saint-Hilaire. (Source : Wikipedia) |
Fleuve aux charmes puissants, où notre nef rapide
A glissé,
Mon cœur ému, ravi, sur ton onde limpide
S'est bercé !
Mon œil a vu pencher d'odorantes ramures
Sur tes eaux ;
Un frisson parcourut, à tes joyeux murmures,
Tous mes os.
J'ai vu tes bords riants, j'ai vu tes blondes rives
Et leurs fleurs,
Et les zéphyrs portant sur leurs ailes hâtives
Mes douleurs.
J'ai vu ton sein d'azur sous des barques heureuses
S'entrouvrir,
J'ai vu tes verts bosquets sous des chansons nombreuses
Retentir.
J'ai contemplé longtemps ton écume légère,
Blanc manteau
Qui semblait te voiler comme le blanc suaire
D'un tombeau.
Fleuve aux paisibles flots, aux caressantes lames,
Mon cœur las
De l'amour, de l'ivresse a humé les dictames
Dans tes bras !
Avec une fillette, emporté sur tes vagues
Bien souvent
Je m'enfuyais au loin, écoutant tes bruits vagues
En rêvant.
Et, la main dans la main, oubliant jusqu'au monde,
On parlait ;
De notre âme un bonheur profond comme ton onde
S'écoulait.
Nous regardions la brise aux ailes d'émeraude
S'amuser ;
Nous trempions dans ton sein notre lèvre encor chaude
D'un baiser.
Et puis, grisés d'amour, enivrés d'allégresse
Et d'espoir,
Nous te quittions tous deux quand monte l'ombre épaisse
Au ciel noir.
Fleuve où l'on aimait tant, dans notre nef rapide,
À glisser,
Puisses-tu nous revoir sur ton onde limpide
Nous bercer !...
Rodolphe Chevrier (1887)
Tiré de : Rodolphe Chevrier, Tendres choses, Montréal, J. P. Bédard Imprimeur-Éditeur, 1892, p. 43-47.
* Louis Gustave Rodolphe Chevrier est né à Ottawa le 5 août 1868, de Joseph Alphonse Chevrier et de Marie Fairbanks. Il fit ses études primaires à Ottawa, chez les Frères des Écoles chrétiennes, puis ses études secondaires au Collège Bourget de Rigaud. À partir de 1886, il étudia la médecine à l'Université Laval de Montréal, dont il obtint le diplôme en juin 1890. À l'automne de la même année, il partit pour Paris afin de compléter ses études médicales à Paris, où il fut élu membre de la Société obstétrique et gynécologique de Paris. Il profita de ce séjour pour visiter la France, l'Angleterre et la Suisse. Il expédia alors des lettres de voyages dans divers journaux du Québec.
Actif dans la vie littéraire, il collabora à divers journaux et périodiques, dont Le Monde illustré ; Le Glaneur ; Le Nord ; La Fortune (journal littéraire) ; Le Canada. En 1892, il publia Tendres choses, son unique recueil contenant des poésies composées pour la plupart durant ses années comme pensionnaire au Collège Bourget de Rigaud et ses études de médecine à Montréal, de même que durant son séjour européen.
Il s'impliqua aussi dans divers mouvements politiques, sociaux et patriotiques. Il fut notamment membre de la Commission des pensions militaires et de la Commission du district fédéral. En 1892, il devint échevin de la ville d'Ottawa.
Il s'impliqua aussi dans divers mouvements politiques, sociaux et patriotiques. Il fut notamment membre de la Commission des pensions militaires et de la Commission du district fédéral. En 1892, il devint échevin de la ville d'Ottawa.
Il débuta sa carrière médicale en 1891, comme gynécologiste à l'Hôpital général d'Ottawa, dont il présida le conseil médical et fut le chirurgien-chef. De 1932 à 1949, il devint le premier directeur médical de l'Hôpital Saint-Vincent d'Ottawa pour incurables.
Rodolphe Chevrier est mort à Ottawa le 11 février 1949. Il avait épousé Joséphine Bell le 11 octobre 1892, à la paroisse Notre-Dame de Montréal.
(Sources : Jules Fournier, Anthologie des poètes canadiens, Montréal, 1920, p. 132 ; John Hare, Anthologie de la poésie québécoise du XIXe siècle (1790-1890), Montréal, éditions Hurtubise HMH, 1979, p. 399 ; journal Le Monde illustré, 7 mai 1892, p. 3 ; Biographies canadiennes-française, édition de 1923, Montréal, p. 301 ; Dictionnaire des œuvres littéraires du Québec, tome 1, Montréal, éditions Fides, 1981, p. 695).
De Rodolphe Chevrier, les Poésies québécoises oubliées ont également présenté : Rêverie et Vous souvient-il ?
Tendres choses, recueil de Rodolphe Chevrier d'où est tiré le poème Au Richelieu, ci-haut. (Cliquer sur l'image pour l'agrandir) |
Dans le numéro du 10 juillet 1892 de la revue littéraire Le Glaneur, publiée à Lévis par Pierre-Georges Roy, l'écrivain et membre de l'École littéraire de Montréal, Germain Beaulieu a publié ce portrait de Rodolphe Chevrier, à l'occasion de la sortie de son recueil de poésies Tendres choses. (Cliquer sur l'image pour l'agrandir) |
Dans le journal Le Monde illustré du 7 mai 1892, le journaliste et poète Amédée Denault, sous son nom de plume de Jules Saint-Elme, publia cet hommage à Rodolphe Chevrier et à son recueil Tendres choses. (Source : BANQ ; cliquer sur l'image pour l'agrandir) |
Rodolphe Chevrier en 1923. (Source : Biographies canadiennes- françaises, Montréal, 1923, p. 301) |
Dans sa fort bien faite Anthologie de la poésie québécoise du XIXe siècle, parue en 1979, John Hare a fait une place à quelques poèmes de Rodolphe Chevrier. (Cliquer sur l'image pour l'agrandir) |
Procurez-vous l'un des quelques exemplaires encore disponibles
de Nos poésies oubliées, un volume préparé par le concepteur
du carnet-web des Poésies québécoises oubliées, et qui présente
100 poètes oubliés du peuple héritier de Nouvelle-France, avec
pour chacun un poème, une notice biographique et une photo
ou portrait. Pour se procurer le volume par Paypal ou virement
Interac, voyez les modalités sur le document auquel on accède
en cliquant sur l'image ci-dessous. Pour le commander par
VISA, cliquer ICI.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire