Joseph-Napoléon Legault (1855-1900) (Source : BANQ) |
[Fragments]
Nous aimons vivre en vous, nos immortels aïeux,
Couchés dans vos linceuls, couronnés dans les cieux,
Vous fûtes autrefois martyrs de la patrie,
En voulant du Saxon réprimer la furie.
Au milieu des vainqueurs, vos coeurs toujours bretons
Ont conservé la foi vivace sur vos fronts,
Victimes du devoir, de l'Anglais, sans bassesse,
Vous saviez repousser la trompeuse promesse.
« Du temple des honneurs dédaignant les parvis,
« Nous préférons encore, toujours notre pays » :
Héros de trente-sept, ce fut votre langage,
Et toujours vos enfants garderont cet adage !
Ô saints martyrs pour qui l'on fit des échafauds,
Pardon si nous troublons votre immortel repos.
Combien cruelle fut la noire barbarie
Qui voulut arracher vos bras à la patrie.
Contre votre fierté, la superbe Albion
Ne put voir triompher sa domination.
Enfin le jour a lui, ce jour de vengeance
Où les tyrans ont vu baisser leur arrogance.
À travers les sentiers s'avance l'ennemi
Qui croit prendre partout le village endormi.
Mais Gore, à Saint-Denis, a vu ternir la gloire
Et dans un court combat, dut céder la victoire,
Et nos braves soldats, ployant sous les lauriers,
Chantaient avec amour, dans leurs transports guerriers :
« Salut drapeau de ma noble patrie,
Toi que je vois flottant sur nos remparts.
Salut drapeau, ma seule idolâtrie,
Toi le plus saint de tous les étendards.
À ton aspect mon âme se ranime,
Mon coeur palpite et renaît plein d'orgueil ;
Sous tes regards mon courage s'anime :
Qu'un jour tes plis recouvrent mon cercueil.
Combien de fois, courant à la victoire,
Tu vis marcher nos pères sous tes plis ;
Combien de fois, enivrés de ta gloire,
Nos fiers soldats t'acclamaient de leurs cris.
À Carillon, la gloire de nos pères !
Tu sus braver les éclats du canon,
Et ces héros, tes défenseurs austères,
Par leur vaillance ont illustré leurs noms.
Vaillant drapeau, noirci dans les batailles,
Que ton amour soutienne encore nos coeurs ;
Digne ornement de nos vieilles murailles,
Reviens encore guider nos pas vainqueurs.
Que tes exploits, écrits en traits de flammes,
Restent pour nous un touchant souvenir,
Que ta splendeur, ennoblissant nos âmes,
Sache éclairer nos fils dans l'avenir ».
Vous, immortel Chénier ! illustre Papineau !
De notre liberté vous fûtes le berceau.
La froide mort en vain vous a chargés de chaînes,
En vain l'ambition vous poursuit de ses haines :
En Dieu fut votre espoir, au pays votre sang !
Oui, nous vous proclamons héros dignes du Franc ! [...]
Un instant descendez de vos trônes célestes,
Et venez admirer les merveilles agrestes
Qui remplissent ces champs, témoins de vos combats.
Champs si souvent alors sillonnés de vos pas.
Amour, respect, honneur à ces grands Patriotes
Qui furent nos sauveurs et nos compatriotes.
Mais s'il nous est permis de parer les tombeaux
De nos pères meurtris au fond de leurs cachots,
Et si de l'héroïsme il nous faut un modèle :
Voyez ce lourd vaisseau fendant l'onde infidèle,
Il porte dans ses flancs un troupeau d'exilés
Aux coeurs endoloris, par les balles criblés :
« Barbares, arrêtez, ce sont nos tendres pères ! ».
« Ce sont nos fils chéris », disaient les pauvres mères.
Et mourant de douleur, étouffant leurs sanglots,
Ils suivaient le trois-mâts fendant toujours les flots.
Frères, consolez-vous, vous restez au rivage ;
Eux n'auront plus jamais que l'exil pour partage.
Ô Dieu, dirigez-les de votre doigt divin,
De la mort éloignez l'implacable destin.
Mourir abandonné, sans embrasser sa mère ?...
Mourir si loin... si loin... sur la terre étrangère !
Le coeur anéanti, sans un doux au-revoir !...
Mon Dieu !... Quelle torture !... Amis!... Quel désespoir !
À vous, du vrai martyre nous accordons la palme ;
Frères, voguez en paix sur une mer plus calme.
De l'immortalité recevez les fleurons.
Eux seuls doivent orner vos héroïques fronts.
Dormez votre sommeil au sein de l'Australie,
Car, par vous, à nos pas la gloire se rallie. [...]
Joseph-Napoléon Legault* (1897)
Couchés dans vos linceuls, couronnés dans les cieux,
Vous fûtes autrefois martyrs de la patrie,
En voulant du Saxon réprimer la furie.
Au milieu des vainqueurs, vos coeurs toujours bretons
Ont conservé la foi vivace sur vos fronts,
Victimes du devoir, de l'Anglais, sans bassesse,
Vous saviez repousser la trompeuse promesse.
« Du temple des honneurs dédaignant les parvis,
« Nous préférons encore, toujours notre pays » :
Héros de trente-sept, ce fut votre langage,
Et toujours vos enfants garderont cet adage !
Ô saints martyrs pour qui l'on fit des échafauds,
Pardon si nous troublons votre immortel repos.
Combien cruelle fut la noire barbarie
Qui voulut arracher vos bras à la patrie.
Contre votre fierté, la superbe Albion
Ne put voir triompher sa domination.
Enfin le jour a lui, ce jour de vengeance
Où les tyrans ont vu baisser leur arrogance.
À travers les sentiers s'avance l'ennemi
Qui croit prendre partout le village endormi.
Mais Gore, à Saint-Denis, a vu ternir la gloire
Et dans un court combat, dut céder la victoire,
Et nos braves soldats, ployant sous les lauriers,
Chantaient avec amour, dans leurs transports guerriers :
« Salut drapeau de ma noble patrie,
Toi que je vois flottant sur nos remparts.
Salut drapeau, ma seule idolâtrie,
Toi le plus saint de tous les étendards.
À ton aspect mon âme se ranime,
Mon coeur palpite et renaît plein d'orgueil ;
Sous tes regards mon courage s'anime :
Qu'un jour tes plis recouvrent mon cercueil.
Combien de fois, courant à la victoire,
Tu vis marcher nos pères sous tes plis ;
Combien de fois, enivrés de ta gloire,
Nos fiers soldats t'acclamaient de leurs cris.
À Carillon, la gloire de nos pères !
Tu sus braver les éclats du canon,
Et ces héros, tes défenseurs austères,
Par leur vaillance ont illustré leurs noms.
Vaillant drapeau, noirci dans les batailles,
Que ton amour soutienne encore nos coeurs ;
Digne ornement de nos vieilles murailles,
Reviens encore guider nos pas vainqueurs.
Que tes exploits, écrits en traits de flammes,
Restent pour nous un touchant souvenir,
Que ta splendeur, ennoblissant nos âmes,
Sache éclairer nos fils dans l'avenir ».
Vous, immortel Chénier ! illustre Papineau !
De notre liberté vous fûtes le berceau.
La froide mort en vain vous a chargés de chaînes,
En vain l'ambition vous poursuit de ses haines :
En Dieu fut votre espoir, au pays votre sang !
Oui, nous vous proclamons héros dignes du Franc ! [...]
Un instant descendez de vos trônes célestes,
Et venez admirer les merveilles agrestes
Qui remplissent ces champs, témoins de vos combats.
Champs si souvent alors sillonnés de vos pas.
Amour, respect, honneur à ces grands Patriotes
Qui furent nos sauveurs et nos compatriotes.
Mais s'il nous est permis de parer les tombeaux
De nos pères meurtris au fond de leurs cachots,
Et si de l'héroïsme il nous faut un modèle :
Voyez ce lourd vaisseau fendant l'onde infidèle,
Il porte dans ses flancs un troupeau d'exilés
Aux coeurs endoloris, par les balles criblés :
« Barbares, arrêtez, ce sont nos tendres pères ! ».
« Ce sont nos fils chéris », disaient les pauvres mères.
Et mourant de douleur, étouffant leurs sanglots,
Ils suivaient le trois-mâts fendant toujours les flots.
Frères, consolez-vous, vous restez au rivage ;
Eux n'auront plus jamais que l'exil pour partage.
Ô Dieu, dirigez-les de votre doigt divin,
De la mort éloignez l'implacable destin.
Mourir abandonné, sans embrasser sa mère ?...
Mourir si loin... si loin... sur la terre étrangère !
Le coeur anéanti, sans un doux au-revoir !...
Mon Dieu !... Quelle torture !... Amis!... Quel désespoir !
À vous, du vrai martyre nous accordons la palme ;
Frères, voguez en paix sur une mer plus calme.
De l'immortalité recevez les fleurons.
Eux seuls doivent orner vos héroïques fronts.
Dormez votre sommeil au sein de l'Australie,
Car, par vous, à nos pas la gloire se rallie. [...]
Joseph-Napoléon Legault* (1897)
Tiré de : Soixante ans de liberté, 1837-97 ; souvenirs patriotiques par nos meilleurs écrivains, Montréal, Déom Frères Éditeurs, 1897, p. 31-35.
* Joseph-Napoléon est né à Saint-Eugène (Ontario) le 15 septembre 1855, d'Eustache Legault et d'Hélène James dit Carrière. Il fit ses études classiques au Collège de Montréal, puis fut instituteur, d'abord dans le village Saint-Jean-Baptiste de Montréal, puis à Saint-Jacques-le-Mineur. Il s'inscrivit ensuite en médecine à l'Université Laval de Montréal et à l'Université Victoria, de Cobourg (Ontario).
En 1890, il pratiqua la médecine dans Saint-Jean-Baptiste de Montréal, puis, vers 1894-1895, dans Saint-Henri, alors une municipalité indépendante au sud-ouest de Montréal.
Intéressé par la vie littéraire, il collabora à l'hebdomadaire Le Monde illustré, où il publia notamment des poésies. Il publia également dans La Revue des deux France, en janvier 1899, un poème en hommage à la France, Ma mère patrie. En mars 1899, il publia dans Le Monde illustré une nouvelle fantastique, Légende canadienne : Le champ de Tacoma.
En juillet 1899, il fut nommé médecin-inspecteur de l'Association des barbiers de la province de Québec.
Le 5 ou 6 août 1900, il fut victime d'un accident de bicyclette au coin des rues Notre-Dame et Atwater, à Montréal, dont il mourut le 11 août à l'âge de 44 ans. Il avait épousé Angélina Hébert le 24 juillet 1876, à la paroisse Sainte-Brigide de Montréal.
(Sources : Culture des futurs ; Ancestry.ca ; Le Monde illustré, 22 juillet 1899 et 25 août 1900).
Le poème Honneur aux héros de 1837-38, ci-haut, de Joseph-Napoléon Legault, est tiré de l'ouvrage collectif en mémoire des Patriotes de 1837-38, Soixante ans de liberté, paru en 1897, que l'on peut télécharger gratuitement ICI. (Cliquer sur l'image pour l'agrandir) |
« Vaillant drapeau, noirci dans les batailles,
Que ton amour soutienne encore nos coeurs ;
Digne ornement de nos vieilles murailles,
Reviens encore guider nos pas vainqueurs.
Que tes exploits, écrits en traits de flammes,
Restent pour nous un touchant souvenir,
Que ta splendeur, ennoblissant nos âmes,
Sache éclairer nos fils dans l'avenir ».
Cet authentique drapeau des Patriotes de 1837-38
se trouve dans la chapelle où sont inhumés Louis- Joseph Papineau et sa famille, dans son domaine de Montebello, en Outaouais. Les lettres « P L H » seraient censées signifier : Patrie, Liberté, Honneur.
(Photo : Daniel Laprès, 23 juillet 2013 ;
cliquer sur l'image pour l'agrandir)
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Acte de naissance de Joseph-Napoléon Legault tiré du registre de la paroisse Saint-Eugène (Ontario). (Source : Ancestry.ca ; cliquer sur l'image pour l'agrandir) |
En juillet 1899, Joseph-Napoléon Legault était nommé médecin-inspecteur de l'Association des barbiers de la province de Québec. Article paru dans Le Monde illustré du 22 juillet 1899. (Source : BANQ ; cliquer sur l'image pour l'agrandir) |
Cet article paru le 6 août 1900 dans La Presse fait état de l'accident de bicyclette subi par Joseph-Napoléon Legault et qui lui sera fatal. Il s'agissait probablement de l'un des premiers accidents mortels de bicyclette à Montréal. (Source : BANQ ; cliquer sur l'image pour l'agrandir) |
Annonce du décès de Joseph-Napoléon Legault dans L'Étoile du Nord (Joliette) du 16 août 1900. (Source : BANQ) |
Article paru dans Le Monde illustré du 25 août 1900. L'âge indiqué est erroné, car J.-N. Legault avait 44 ans, et non 46, au moment de son décès. (Source : BANQ ; cliquer sur l'image pour l'agrandir) |
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Impressionnant comme poème et comme sacrifice... MERCI de nous l'avoir rappelé à nos mémoires défaillantes...ou absentes...
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