dimanche 27 janvier 2019

Ma Gaspésie

Blanche Lamontagne (1889-1958)

(Source : Portraits de femmes, tome 1,
Montréal, éditions La Patrie,
1938, p. 66)




   Fille du Saint-Laurent aux magiques contours,
   C'est un pays de monts, de coteaux pittoresques,
   Où les rochers, flanqués de parois gigantesques,
   Voisinent la montagne aux gracieux détours. 

   La mer baise ses pieds, la vague enchanteresse
   Y jette ses refrains dans le couchant vermeil ;
   Et la vigueur de ses noroîts et son soleil
   Nous font lever le front, sous leur rude caresse.

   Ses collines, ses caps qui dominent la mer
   Sont comme des géants résistant aux années,
   Que ni les vagues, ni les brises déchaînées
   Ne peuvent ébranler sur leur socle de fer.

   Au-dessus de ses monts à la haute corniche,
   Les cèdres et les pins forment de verts bouquets,
   Et dans la profondeur des bois et des bosquets, 
   Le vorace épervier auprès des pinsons niche.

   Si blancs sont les bateaux qu'on y voit louvoyer,
   Si large est l'horizon dans la brise légère,
   Que notre âme, à son tour éprise de lumière,
   Pour des cieux inconnus voudrait appareiller.

   Il n'est pas de pays, pas d'endroit sur la terre
   Où souffle un vent plus pur, où vit plus de beauté.
   La poésie éclate en sa rusticité,
   Et l'aigle et ma pensée habitent dans son aire.

   Ma pensée inlassable, avide d'infini,
   Battant de l'aile aux murs des sublimes rivages,
   Revient obstinément à ces rives sauvages
   Comme l'aigle revient mourir près de son nid. 

                             Blanche Lamontagne* (1928)




Tiré de : Blanche Lamontagne-Beauregard, Ma Gaspésie, Montréal, 1928, p. 7-9.

*  Blanche Lamontagne est née aux Escoumins le 13 janvier 1889, d'Émile Lamontagne, commis, et d'Amanda Lévesque. De 1897 à 1908, elle étudia à Cap-Chat, au couvent de Sainte-Anne-des-Monts et à l'École d'enseignement supérieur pour jeunes filles de Montréal. Elle fut l'une des premières femmes inscrites au certificat de littérature de l'Université Laval à Montréal (1909). Elle suivit aussi de nombreux cours d'arts plastiques.
   En 1911, une suite poétique, parue sous le pseudonyme « Pour la Patrie », lui valut le prix du concours littéraire de la Société du parler français. Elle publia divers recueils de poésies et de contes, de même que quelques romans : Visions gaspésiennes (1913) ; Par nos champs et nos rives (1917) ; La vieille maison (1920) ; Les trois lyres (1923) ; Un coeur fidèle (1924) ; Récits et légendes (1924) ; La moisson nouvelle (1926) ; Légendes gaspésiennes (1927) ; Ma Gaspésie (1928) ; Au fond des bois (1931) ; Dans la brousse (1935) ; Le rêve d'André (1943). Elle écrivit également un livret d'opéra, Francine, dédié à la compositrice et pédagogue musicale Albertine Morin-Labrecque et qui fut présenté en 1930 au Conservatoire national de musique.
   Elle collabora à divers périodiques, dont La bonne parole, Le Canada français, La Revue nationale, Le Passe-Temps, La Revue moderne, Paysana, La Ronde d'office, etc. 
   En 1924, elle devint membre de la Société des poètes canadiens-français. En 1928, son poème Gaspésie, terre du silence lui valut la médaille d'argent du concours du Salon des poètes, à Lyon (France).
   En 1937, elle participa au Grand gala de la poésie organisé par la Société des écrivains canadiens-français, qui eut lieu à l'Auditorium Le Plateau, à Montréal, à l'occasion du Deuxième congrès de la langue française.
   En 1946, elle fut auteur-ressource pour certaines émissions de Tableaux canadiens, à la radio de Radio-Canada.
   En 1956, elle fut nommée membre à vie de la Société des poètes canadiens-français en hommage à son apport à la littérature québécoise.
   Sont dédiés à sa mémoire la rue Lamontagne, à Sherbrooke, le mont Blanche-Lamontagne situé dans le Parc de conservation de la Gaspésie et le parc Blanche-Lamontagne, à Montréal.
   Le critique d'art et de littérature Henri d'Arles a écrit de Blanche Lamontagne qu'elle « semble posséder la grâce magique de découvrir le mystère qui erre autour des choses et les enveloppe, d'extraire de la matière commune le sens et la beauté qui y dorment et que seuls les poètes savent éveiller ». 
   Blanche Lamontagne est morte à l'hôpital Saint-Jeanne-d'Arc, à Montréal, le 25 mai 1958. Elle est inhumée dans cette même ville, au cimetière Notre-Dame-des-Neiges. On peut lire sur sa pierre tombale : « Elle mit toute son âme à chanter son pays ». Elle avait épousé Hector Beauregard, avocat, le 15 juillet 1920. 
(Sources : Marie-Paule Desjardins, Dictionnaire biographique des femmes célèbres et remarquables de notre histoire, Montréal, éditions Guérin, 2007, p. 276-277 ; Dictionnaire des oeuvres littéraires du Québec, tome 2, Montréal, éditions Fides, 1981, p. 1165-1166 ; Georges Bellerive, Brèves apologies de nos auteurs féminins, Québec, Librairie Garneau, 1920, p. 86-95). 

De Blanche Lamontagne, les Poésies québécoises oubliées ont également présenté : Il vente (cliquer sur le titre).


Le poème Ma Gaspésie, ci-haut,
est tiré du recueil portant le même
titre, de Blanche Lamontagne.

(Cliquer sur l'image pour l'agrandir)

Dédicace manuscrite de Blanche Lamontagne dans
son recueil Ma Gaspésie et adressée à Antoine
Taschereau, frère du premier ministre du Québec
de 1920 à 1936, Louis-Alexandre Taschereau.

(Collection Daniel Laprès ; 
cliquer sur l'image pour l'agrandir)

Blanche Lamontagne, vers 1920.

(Source : BANQ)

L'écrivaine Michelle Le Normand a signé cet article
dans le numéro de juin 1958 de la revue Lectures.

(Source : BANQ ; cliquer sur l'image pour l'agrandir)

Article paru dans Le Progrès du Golfe,
de Rimouski, le 13 juin 1958.

(Source : BANQ : cliquer sur l'image pour l'agrandir)

L'écrivain et critique littéraire Harry Bernard a signé cet article
dans Le Courrier de Saint-Hyacinthe du 24 juillet 1958, .
(Source : BANQ ; cliquer sur l'image pour l'agrandir)

Notice nécrologique dans
La Presse du 28 mai 1958.

(Source : BANQ)


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1 commentaire:

  1. Prêtons l'oreille aux "Chants du vieux ber - Blanche Lamontagne lu par Yvon Jean": https://www.youtube.com/watch?v=fycM3jZb948

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