vendredi 21 décembre 2018

Les grains d'encens

Germaine Bernier (1902-1986)
(Source : Fonds Germaine Bernier
Archives UQAM, 115P-020:F3/6)




   Chaque jour en vivant, nous aimons quelque chose ;
   Un sourire, un regard, un baiser, une fleur,
   Le ciel d'un matin pur, un crépuscule rose,
   Un nuage plus blanc sur un jour de chaleur. 

   Au fond de la mémoire un souvenir qui chante,
   Refleurissant le coeur qui s'en trouve embaumé ;
   Un vieux refrain qui berce, un vers qui nous enchante !
   C'est souvent ce qu'il faut pour vivre un jour aimé.

   Et tous ces légers riens qui parfument nos heures
   Ont souvent plus de prix, font souvent plus de bien
   Que tous les plaisirs fous, les fêtes pas meilleures
   Où le bruit seul captive, où le bonheur n'a rien.

   Et tous ces riens menus, gracieux et fragiles, 
   Arrivent jusqu'au coeur, y tombent pour briller
   Comme des grains d'encens aux odeurs très subtiles
   Qu'on met sur des charbons et qu'on laisse brûler...

   Aussi, moi qui connais la valeur de ces choses,
   J'ai voulu les garder, je veux les retenir : 
   Parfums de mes amours et parfums de mes roses, 
   Oh ! restez dans mes vers, vous ne pouvez mourir !

   J'aime tout ici-bas : chaque jour en mon âme
   Brûlent des grains d'encens, parce que chaque jour
   Un sourire, un regard, un beau vers me réclame ;
   Dans un chant, dans un son, je trouve un peu d'amour...

   Et c'est dans cet encens que viennent les poèmes !
   Chaque grain, en brûlant, allume vite un vers !
   Et parce que j'adore et que, joyeuse, j'aime,
   Aimant, je chanterai demain autant qu'hier !

   Je chanterai toujours : l'amitié la meilleure,
   La joie et le souci, la pluie et le beau temps, 
   La lumière du jour, la nuance de l'heure...
   Les brumes de l'hiver, le retour des printemps !

   Je chanterai, pourvu que dans mon chant suprême, 
   Viennent encor brûler, tout au fond de mon coeur, 
   Les petits grains d'encens qui forment les poèmes,
   Brûlant pour la Beauté, chantant sur le Bonheur !

                                      Germaine Bernier(1931)



Tiré de : revue Le Canada français, Québec, mars 1931.

*  Musicienne, professeur, journaliste, auteure, conférencière, Germaine Bernier est née à Montréal le 7 juin 1902, de François-Xavier Bernier, contremaître, et d'Exilda Hamel.
   En 1918, elle fut lauréate en piano au Conservatoire national de musique, à Québec. Elle obtint par la suite un brevet d'enseignement de l'Académie de musique de Québec et trois attestations du Royal College of Music de Londres (Angleterre) qui avait tenu des séances d'examen à Montréal. Elle fut professeur de musique durant douze ans.
   En 1930, elle entra au journal Le Devoir, où elle fut tour à tour, jusqu'à sa retraite en 1963, rédactrice de la page féminine, de la « Chronique du lundi » et de la « Chronique de la quinzaine ». Elle collabora également à plusieurs journaux et revues, dont L'Action nationale, Le Canada français, L'École canadienne, Paysana, Familia, La Terre et le Foyer, Les Cahiers du nursing, Relations, Nos Enfants, etc., qui publièrent abondamment ses écrits souvent signés de pseudonymes tels « Prisca », « Claudine », « Elisabeth Desneiges », « Elise de Blois » et « Camerata ». Pendant douze ans au Devoir, elle avait signé «Prisca » ses articles et plusieurs poèmes. Ses articles furent également publiés dans des périodiques étrangers, en Europe comme aux États-Unis. Elle a publié deux ouvrages, Impressions de France et d'Italie (1954) et Le Portugal (1961). 
   Présidente du Cercle des femmes journalistes (1954-56), elle fonda au cours de ce mandat le Service du livre français, dont la principale activité était la cueillette et la distribution de livres neufs et usagés. 
  Membre de nombreuses sociétés et associations, elle fut désignée « Femme de l'année » par le Conseil des femmes de la Chambre de commerce du district de Montréal (1961). Elle fut également récipiendaire de la Médaille d'or de la ville d'Aix-en-Provence (1953) et la Médaille d'or de la ville de Vichy (1961).
   Elle est la première femme à recevoir, en 1962, le Prix Olivar-Asselin de journalisme, décerné par la Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal.
   Marie-Paule Desjardins a écrit de Germaine Bernier : « Femme brillante et dynamique qui s'affirme dans une profession  peu ouverte à l'élément féminin, elle excelle dans les conférences-forums, défend le droit au travail de la femme à l'extérieur du foyer, s'intéresse fortement à l'éducation et met l'accent sur le dépassement de soi ».
   Germaine Bernier est morte à Montréal le 1er avril 1986. Une biographie, signée Germaine Laplante, lui avait été consacrée en 1978 (information ICI).
(Sources : Marie-Paule Desjardins, Dictionnaire biographique des femmes célèbres et remarquables de notre histoire, Montréal, éditions Guérin, 2007, p. 38 ; UQAM - Service des archives et de gestion des documents ; Ancestry.ca). 

Le poème Les grains d'encens, ci-haut,
est paru dans le numéro de mai 1931 de
la revue Le Canada français.

(Source : BANQ ;

cliquer sur l'image pour l'agrandir) 

Extrait de baptême de Germaine Bernier, paroisse de la
basilique Notre-Dame-de-Montréal, 7 juin 1902.

(Source : Ancestry.ca ; cliquer sur l'image pour l'agrandir)

Article paru dans La Presse du 3 avril 1986 à l'occasion du décès de Germaine Bernier.

(Source : BANQ ; cliquer sur l'image pour l'agrandir)

Le Devoir, 3 avril 1986.

(Source : BANQ ; cliquer sur l'image pour l'agrandir)

Notice nécrologique dans
La Presse, 3 avril 1986


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