Marie Dumais-Boissonnault (1866-1941) (Source : BANQ) |
À Madame M. L. Lesage
Je connais un très vieux verger
Dont les branches sont toujours vertes.
Point n'est besoin de voyager
Pour voir sa barrière entr'ouverte.
Vous la trouverez en suivant
Le papillon, la libellule ;
L'un va butiner en rêvant
Et l'autre a des ailes de tulle.
Sa clôture a peu de palis :
Dame Vétusté fait son oeuvre ;
Cependant, elle a des lacis
De trèfles d'odeur : vrai chef-d'oeuvre !
Le Temps ― artiste de renom ―
L'a recouverte d'une housse
De boutons d'or. Est-ce le nom
De ce bouton qui monte et pousse ?...
On fleure un parfum de rucher
Dès qu'on traverse la barrière :
Tant d'abeilles d'or vont chercher
Leur miel dans les roses trémières,
Dans la pivoine au ton de chair
Qui voisine avec la pensée
De velours d'or, de velours clair,
L'une près de l'autre tassée.
Les groseilliers sont pleins de fruits :
Grappes rouges et grappes blanches ;
Et comme à mon aise je suis,
Pour les voir choir en avalanches,
Mes doigts prestes se sont tendus
Pour cueillir ta baie écarlate,
Cerise de France, et j'ai dû
Mordre ta pulpe délicate.
L'allée est épaisse de fleurs :
Une averse de blancs pétales
Tombe du pommier parfumeur
Et des roses sentimentales.
Et, tout là-bas, le mai si blanc
Enguirlandé de capucines
De pois d'odeurs s'entremêlant
Au syringa qui me fascine.
Son drapeau voltige vermeil,
Il semble saluer la nue ;
Et sur sa pourpre le soleil
Disperse ses flèches menues.
***
C'est le verger du souvenir,
J'y revois ma sereine enfance,
Les floraisons de l'avenir ;
Et le bonheur en audience...
Marie Dumais-Boissonnault* (1923)
Tiré de : Madame Boissonnault, L'Huis du Passé, Montréal, 1924, p. 181-184.
* Marie Sophie Éléonore Eulalie Dumais est née à Trois-Pistoles le 6 décembre 1866, de Jules Dumais, notaire, et d'Arthémise d'Amours. Après ses études au Couvent de Bathurst, puis à Londres, Paris et Saint-Hélier (île de Jersey), elle devint journaliste, d'abord pour Le Journal (Montréal) et L'Événement (Québec). Utilisant souvent le nom de plume de « Solange », elle fut la première femme au Québec à avoir exercé la profession de journaliste de reportage.
En 1903, elle épousa Lucien Boissonnault, cultivateur de Saint-Blaise-sur-Richelieu. Devenue veuve en 1913, elle reprit sa carrière de journaliste et fit partie de la rédaction des journaux Le Progrès, à Chicoutimi, et Le Saint-Laurent, à Rivière-du-Loup. Après avoir travaillé comme traductrice à Ottawa pour le ministère des Postes, elle fut mutée à Montréal. Elle collabora entretemps à divers autres journaux et revues, dont Le Pionnier, de Nominingue, et Le Canada français, de Saint-Jean-sur-Richelieu.
Membre de la Société des poètes canadiens-français, dont elle fut la présidente, elle s'est méritée les prix Edmond-Rostand et Leconte-de-Lisle, en plus d'avoir été couronnée par les Jeux floraux du Languedoc pour son recueil de poésies, L'Huis du Passé, publié en 1924 suite à un premier recueil, Pro Patria.
Marie Dumais-Boissonnault est morte à Québec le 26 mai 1941. Elle était la mère de Charles-Marie Boissonnault, historien, poète et critique littéraire.
(Source principale : Dictionnaire des oeuvres littéraires du Québec, tome 2, Montréal, éditions Fides, 1981, p. 575-576).
De Marie Dumais-Boissonnault, les Poésies québécoises oubliées ont également présenté : Aurores boréales (cliquer sur le titre).
De Marie Dumais-Boissonnault, les Poésies québécoises oubliées ont également présenté : Aurores boréales (cliquer sur le titre).
L'Huis du Passé, recueil de Marie Dumais-Boissonnault d'où est tiré le poème Le vieux verger, ci-haut. (Cliquer sur l'image pour l'agrandir) |
Marie Dumais-Boissonnault (Source : Georges Bellerive, Brèves apologies de nos auteurs féminins, Québec, Librairie Garneau, 1920) |
Article paru dans Le Soleil du 27 mai 1941 à l'occasion de la mort de Marie Dumais-Boissonnault. (Source : BANQ ; cliquer sur l'image pour l'agrandir) |
Le Devoir du 27 mai 1941 a également souligné la mort de Marie Dumais-Boissonneault. (Cliquer sur l'image pour l'agrandir) (Source : BANQ) |
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