jeudi 25 octobre 2018

Richard III - Mary Tudor la Sanglante

Ephrem Chouinard (1854-1918)

(Source : revue Le Terroir, octobre 1919)



          RICHARD III

   C'est lui, l'infâme meurtrière
   De son frère et de ses neveux, 
   Qui, dans l'art triste de mal faire
   Surpassa toutes ses aïeux. 
   Cet homme monté sur la trône
   Après s'être couvré de sang,
   Jamais dans les yeux de personne
   Ne fut autre qu'oun grand tyran.

   Il avait l'âme vile et noire,
   La coeur de vices saturé,
   Et dans la monde son mémoire
   Il fut toujiours très exécré. 
   D'être reconnu pour oun diable
   C'est déjà beaucoup assez mal ;
   Mais, vrai, c'est trop abominable
   Que d'être oun pareil animal.

   Bien ! Écoute, Richard, écoute !
   Vivant je t'aurais craint, bandit ;
   Mais puisque ta mort ne fait doute,
   Je n'ai point peur : donc sois maudit ! 


          MARY TUDOR LA SANGLANTE

   Mary Tudor était le fille 
   D'Henri Huit par le premier lit.
   Elle était laide en vrai gorille,
   Avec oun teint de pissenlit.
   De son père la fanatisme
   Barbare, étroit, hautain et fol,
   Joint au dangereux royalisme
   De la parentaige espagnol,
   Fut, je crois, le pur héritaige
   Du virago Mary Tudor,
   Si tant il avait l'apanaige
   De tout ce qui fait la butor.

   Oun jour, Philippe Deux d'Espaigne
   Il vint pour réclamer son main.
   Il l'obtint, mais sans son compaigne
   Voulut partir le lendemain. 
   En apercevant cet visaige
   L'hidalgo, surpris, s'était dit : 
   ― Caramba ! vite la veuvaige,
   Autrement je suis déconfit.
   Et, depuis lors, le pauvre reine
   Dut viver loin de son époux,
   Et, pour mieux consoler son peine,
   Fit éclater oun grand courroux.
   D'abord, elle voulut le tête
   De la pauvrette Jeanne Grey,
   Et puis, pour compléter le fête,
   Celle du jeune époux Dudley.
   Northumberland perdit le sienne,
   Ainsi que le fameux Cranmer ;
   Suffolk subit le même peine
   Avec l'évêque Latimer.
   Puis partout se multiplièrent
   Les échafauds et les bûchers,
   Et les flots de sang qui coulèrent
   Auraient attendri les rochers.

   Enfin... elle mourut ― ô chance ! 
   Sans avoir eu le moindre enfant,
   Et c'est là que le Providence
   Pour l'humanité fut clément. 

             Ephrem Chouinard(1910)



Tiré de : Ephrem Chouinard, Petit (sic) histoire des grandes (sic) rois de (sic) Angleterre, Québec, Typographie Laflamme & Proulx, 1910, p. 83 (Richard III) et 98-99 (Mary Tudor la Sanglante).


* Ephrem Chouinard est né à Lévis le 5 avril 1854, de Pierre Chouinard, charpentier, et d'Ombélina Marquis. À l'âge de 14 ans, il interrompit ses études au Collège de Lévis pour entrer au service de la maison Hamel et frères. Il devint représentant de ce marchand de Québec en Europe, où il se rendit plus de trente fois. En 1899, il travailla pour une autre maison commerciale, mais il passa peu après au journalisme.
   Il fonda la Gazette de Québec, qui parut de septembre 1900 à janvier 1901. Il devint directeur du journal Le Soleil, de Québec, en 1904.
   Il passa à la fonction publique pour devenir assistant-protonotaire de la Cour supérieure à Québec, puis il devint en 1903 « assistant-auditeur » (on dirait de nos jours « assistant-vérificateur ») au département du Trésor.
   Il avait épousé Amanda Crépault à Saint-Vallier-de-Bellechasse le 10 septembre 1878.
   Ephrem Chouinard est mort à Québec le 29 novembre 1918.

(Sources : Dictionnaire des œuvres littéraires du Québec, tome 2, Montréal, Fides, 1981, p. 858 ; Ancestry.ca ; revue Le Terroir, décembre 1918 et octobre 1919).

Pour en savoir plus sur le personnage très intéressant que fut Ephrem Chouinard, il vaut la peine de parcourir (aux pages 221 à 227 ou  35 à 40 de la revue elle-même ― du document téléchargeable gratuitement ICI) l'article que G.-E. Marquis a publié en son hommage suite à son décès dans le numéro de décembre 1918 de la revue Le Terroir


Les poèmes Richard III et Mary Tudor  la Sanglante,
ci-haut, sont tirés de Petit histoire des grandes
rois de Angleterre
, d'Ephrem Chouinard. On
peut se procurer de rares exemplaires de cet
ouvrage aussi amusant que savoureux
ICI, ICI et ICI.

(Cliquer sur l'image pour l'agrandir)

Richard III et Mary Tudor, deux parmi les monarques
britanniques dépeints par Ephrem Chouinard dans son
recueil Petit histoire des grandes rois d'Angleterre. Ces
gravures proviennent du même recueil.

Cet entrefilet paru dans La Presse du 9
novembre 1917 fait état d'une mauvaise
chute qu'Ephrem Chouinard a subie sur
la rue Saint-Jean, à Québec, et qui a très
probablement hâté sa mort, survenue un
an plus tard, à 64 ans.

(Source : BANQ)
 

Après sa mauvaise chute qui altéra considérablement
sa santé, Ephrem Chouinard a connu plus que sa part
d'épreuves au cours de la dernière année de sa vie.
Ainsi, un mois avant sa mort, son fils Paul était
victime de la grippe espagnole. Pharmacien, Paul fut
parmi les nombreux professionnels de la santé qui
au Québec ont payé de leur vie d'être restés aux
avant-postes du combat contre cette épidémie. Il
est sûrement bon de se souvenir du courage de ces
héros de l'ombre dont le sacrifice est trop oublié.

(Source : La Presse, 25 octobre 1918, p. 14)

  

Le Soleil du 30 novembre 1918.

(Source : BANQ)


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