Medjé Vézina (1896-1981) (Source : Dictionnaire des œuvres littéraires du Québec, tome 2) |
Quittons furtivement, si tu le veux, la ville ;
Allons, ô mon très cher, surprendre le soleil
Qui saura mieux bouleverser l'âme tranquille
Des coteaux ; rarement l'aube d'un vert réveil
Peut accabler d'ivresse, ici, l'homme et les choses.
L'aurore se chagrine à rechercher les nids.
Le petit-jour en pleurs rencontre peu de roses ;
À peine un cri d'oiseau quand flambe le midi.
Fuyons, si tu le veux, une foule pressée,
Courant mal éveillée à son banal destin.
Vois : déjà la clarté ruisselle dispersée,
Le miracle du monde est tout dans ce matin !
Mon rêve a faim et soif de liberté, d'espace ;
Allons vers la maison qui nous appelle ailleurs,
Vers ce village blanc que la montagne enlace,
Où l'air, le sol, l'azur sont un triple bonheur,
Tout un jour recueillir l'heure si plénière
Du rayon qui mit sa caresse dans ta voix ;
Dans le soir étonné des lampes sans lumière,
Alors te murmurer : « Ma lumière, c'est toi ! »
Vois, les âmes d'ici savent trop la rancune
D'appeler un bonheur qui ne se lève pas ;
Là-bas les nuits sont des oiseaux couleur de lune
Et l'on est humble ainsi qu'un brin de réséda !
Medjé Vézina* (1934)
Tiré de : Medjé Vézina, Chaque heure a son visage, Montréal, Les Éditions du Totem, 1934, p. 47-48.
* Ernestine dite Medjé Vézina est née à Montréal le 16 avril 1896, de Joseph-Damien Vézina, médecin, et de Fabiola Alain. Après des études au couvent de Lachine, qu'elle termina en 1914, elle fut lauréate de l'Académie de musique de Québec, puis en 1926, elle entra à titre de publiciste-stagiaire à l'École d'art paysan de Québec et devint codirectrice, avec Adrienne Choquette, de Terre et Foyer, revue d'éducation populaire publiée par le gouvernement du Québec.
Durant vingt-six ans, elle prépara l'édition mensuelle de la revue avec l'aide de deux illustratrices, Suzanne Auger et Cécile Lemieux. Entretemps, elle fut, de 1941 à 1944, rédactrice et directrice de la Revue des Fermières, publiée par le ministère de l'Agriculture du Québec.
En 1934, elle publia Chaque heure a son visage, son unique recueil de poésies. Elle participa, à l'Auditorium du Plateau à Montréal, au Grand gala de poésie organisé par la Société des écrivains canadiens-français à l'occasion de la tenue du Deuxième Congrès de la langue française au Canada. Elle a collaboré à divers périodiques dont Le Jour, la Revue populaire, la Revue moderne, Paysana, L'Émérillon, Elle prit sa retraite en 1961.
Son recueil Chaque heure a son visage est célébré dans les termes suivants par les critiques littéraires Laurent Mailhot et Pierre Nepveu : « [...] d'une passion généreuse et tourmentée, qui suffit à placer [Medjé Vézina] au tout premier rang des poètes de son époque. Souvent négligée parmi les voix féminines du début des années trente, Medjé Vézina les domine pourtant par la rigueur et l'intensité de son écriture ».
Medjé Vézina est morte à Québec le 4 avril 1981.
(Sources : Marie-Paule Desjardins, Dictionnaire biographique des femmes célèbres et remarquables de notre histoire, Montréal, éditions Guérin, 2007, p. 484 ; Dictionnaire des oeuvres littéraires du Québec, tome 2, Montréal, éditions Fides, 1981, p. 215 ; Laurent Mailhot et Pierre Nepveu, La poésie québécoise des origines à nos jours, Montréal, éditions de L'Hexagone, 1981, p. 209).
Chaque heure a son visage, recueil de Medjé Vézina d'où est tiré le poème Mon rêve habite près des feuilles, ci-haut. Il ne reste sur le marché en ligne qu'un seul exemplaire de l'édition originale de 1934, voir ICI. Une réédition est disponible, voir ICI. (Cliquer sur l'image pour l'agrandir) |
Medjé Vézina, années 1930. (Source : L, Mailhot et P. Nepveu, La poésie québécoise des origines à nos jours, p. 209) |
Les pages littéraires des journaux de l'époque ne semblent avoir fait aucune mention de la mort de Medjé Vézina. Seule cette notice nécrologique est parue dans Le Soleil du 9 avril 1981. (Source : BANQ) |
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Merci Madame Vézina... votre âme est encore là près du cœur des Québécois
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