dimanche 11 février 2018

Sur la tombe d'Ernest Gagnon

Pierre tombale d'Ernest Gagnon au
cimetière Notre-Dame-de-Belmont, à
Québec. 


(Photo : Daniel Laprès, 2017;
cliquer sur l'image pour l'agrandir) 



     (Poème inédit dédié à Blanche, fille d'Ernest Gagnon, 
      et ici publié pour la première fois)


   Sous un pâle soleil d'automne,
   Je t'ai trouvé, mon vieil ami,
   Où la feuille morte frissonne,
   En un lit profond, endormi.

   Mais à ton logis qui s'incline
   J'ai beau heurter du pied le seuil, 
   Rien n'émeut ta large poitrine,
   Gentilhomme de grand accueil. 

   Gisent-ils sous les pierres blanches,
   Silencieusement croisés,
   Tes doigts d'artiste, le dimanche
   Sur les orgues jadis posés ?

   Et sur ce marbre froid, ta lyre
   Va-t-elle se taire à jamais,
   Elle qui déchaînait un délire
   D'enthousiasmes muets ?

   Non, non ! Aux sources du génie
   Ton âme harmonieuse a bu
   Et, pâmé d'extase infinie, 
   Tranquille, tu jouis du but. 

   Tes yeux sont empourprés d'aurore,
   Tes doigts, de musique assouvis,
   Jouent aux claviers du ciel encore
   Et charment les anges ravis. 

   Froissant du pied la feuille jaune, 
   Le front perdu dans la lueur, 
   J'ai versé sur toi mon aumône, 
   L'humble prière de mon cœur. 

               Armand Chossegros, s.j.* (1915)


Manuscrit du poème tel que conservé aux Archives des Ursulines de Québec

(Photos : Madeleine Gagnon, qui nous a gracieusement 

transmis le poème; cliquer sur l'image pour l'agrandir) 


* Armand Chossegros est né à Céaux d'Allègre dans le diocèse du Puy, en France, le 4 janvier 1864. Fit ses études au collège Saint-Joseph d'Avignon, en France. Entra chez les Jésuites au noviciat du Sault-au-Récollet (Montréal) en 1884 et prononça ses voeux en 1886. Fut ordonné prêtre à Montréal, par Mgr Paul Bruchési, le 3 juillet 1898. Professeur au noviciat jésuite du Sault-au-Récollet, au collège Sainte-Marie de Montréal, au séminaire de Saint-Boniface (Manitoba). De 1913 à sa mort, il enseigna l'histoire ecclésiastique et le droit canon au scholasticat jésuite de l'Immaculée-Conception, à Montréal. Il publia des poèmes dans les journaux et périodiques du temps, de même que, sous le pseudonyme d'Edmond Léo, des critiques littéraires dans Le Devoir. Auteur de Histoire du Noviciat de la Compagnie de Jésus au Canada (1903).  Décédé le 19 mai 1928 à l'Hôtel-Dieu de Montréal. 
Le 21 mai 1928, Le Devoir salua sa mémoire dans un article paru en première page et dans lequel on peut notamment lire :  « Le P. Chossegros a bien voulu, pendant de nombreuses années, nous donner gracieusement son utile et féconde collaboration. Rien ne lui faisait plaisir comme de mettre en relief un nouveau talent ».  
(Sources : Dictionnaire biographique du clergé canadien-français, p. 128 ; Le Devoir, 21 et 22 mai 1928 ; Bulletin des Recherches Historiques).


Pour en savoir plus sur Ernest Gagnon, 
cliquer sur cette illustration : 


Armand Chossegros, s.j. (1864-1928)

(Source : Archives des Jésuites au 
Canada ; cliquer sur l'image pour 
l'agrandir)

Ernest Gagnon (1834-1915)

Musicien, écrivain, historien et officier public,
ami intime d'Armand Chossegros s.j., qui
composa le poème ci-haut à sa mémoire. 

Dédicace d'Ernest Gagnon dans la troisième édition (1894)
de son œuvre-maîtresse Les Chansons populaires du Canada.


(Collection Daniel Laprès ; cliquer sur l'image pour l'agrandir)

Blanche Gagnon (1867-1951)

Fille d'Ernest Gagnon, elle fut auteure,
chroniqueuse et critique d'art musical.
Elle a publié un intéressant livre de
souvenirs, Réminiscences et actualités.

Le poème ci-haut lui a été dédié par
Armand Chossegros s.j., à l'occasion
du décès de son père. 


Elle est inhumée dans le lot de ses parents.

(Source : Blanche Gagnon, Réminiscences
et actualités
, Québec, 1939).  

En 2013, la pierre tombale d'Ernest Gagnon et des membres 
de sa famille au cimetière Notre-Dame-de-Belmont, à Québec,
était dans un piteux état d'abandon. Mais depuis, comme on 

peut le constater sur la deuxième photo prise en septembre 
2017, le monument est entretenu et fleuri avec générosité 
et amour par Madeleine Gagnon (sans
 lien de parenté).

(Photo : Daniel Laprès ; cliquer sur l'image pour l'agrandir)

      

Parlant de nos poètes d'antan et oubliés, l'écrivaine Reine Malouin
(1898-1976), qui a longtemps animé la vie poétique au Québec, a 
affirmé que sans eux, « peut-être n'aurions-nous jamais très bien 
compris la valeur morale, l'angoisse, les aspirations patriotiques, 
la forte humanité de nos ancêtres, avec tout ce qu'ils ont vécu, 
souffert et pleuré ». 

Les voix de nos poètes oubliés nous sont désormais rendues. 
Le concepteur de ce carnet-web a publié l'ouvrage en deux 
tomes intitulé Nos poésies oubliées, qui présente 200 de
de nos poètes oubliés, avec pour chacun un poème, une
notice biographique et une photo ou portrait. Chaque  
tome est l'objet d'une édition unique et au tirage limité. 
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ouvrage qui constitue une véritable pièce de collection
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