samedi 15 septembre 2018

Je pose ma candidature

Émile Coderre
alias Jean Narrache
 
(1893-1970) 

(Source : Richard Foisy, Un poète et son double





   J'commence à m'tanner d'me fair'dire :
   « Pourquoi c'est qu't'es pas député ? »
   J'sais si ben qu'pour me faire élire
   J'ai pas besoin d'êtr'ben futé.

   Il faut un'cart'de compétence
   Mêm'pour être un simple ouvrier,
   Mais ça prend aucun'connaissance
   Pour s'mettre à politicailler. 

   Faudra que j'gagne à la barbotte
   Vu qu'faut du whiskey puis d'l'argent
   Pour pouvoir m'ach'ter assez d'votes ;
   Des cabaleurs, c'est exigeant. 

   Comm'de raison, faut êtr'pratique ;
   Ach'ter trop d'votes, c'est un défaut,
   Vu qu'l'économie politique
   C'est d'pas ach'ter plus d'votes qu'il faut. 

   Un' fois élu, j'm'la coul'rai douce
   Comme tout bon membr'du parlement.
   J'm'éreint'rai à m'tourner les pouces
   Pour supporter l'gouvernement. 

   J'vous promets que j'resterai tranquille
   Puis qu'j'aurai jamais d'opinion.
   À quoi ça sert de s'fair' d'la bile
   Au lieu d's'occuper d'ses oignons ?

   J's'rai pas d'ces zélés qui s'débattent
   En disant qu'ils font leur devoir.
   Moi, j'promets d'rester à quatr'pattes
   Devant ceux qui sont au pouvoir. [...]

                            Jean Narrache(1961)




Tiré de : Émile Coderre, J'parle tout seul quand Jean Narrache, Montréal, Les Éditions de l'Homme, 1961, p. 117-118.

* Émile Coderre, dont le nom de plume est « Jean Narrache », est né à Montréal, dans la paroisse Saint-Vincent-de-Paul (quartier Sainte-Marie), le 10 juin 1893, d'Émile Coderre, pharmacien, et de Jeanne Marchand. Très tôt orphelin, il fut adopté à l'âge de quatre ans par M.-A. Ouimet. Il fut pensionnaire au Séminaire de Nicolet (1904-1912), puis prit sa licence en pharmacie à l'Université de Montréal (1919). En 1924, il devint représentant et publiciste pour la compagnie de peinture Martin-Senour.
   Ayant écrit plusieurs textes pour les journaux sur des sujets littéraires ou techniques, il publia en 1922 un premier recueil de poésies, Les signes sur le sable. Il publia par la suite, sous le nom de plume de Jean Narrache, Quand j'parl' tout seul (1932) ; Histoires du Canada : vies ramanchées (1937) ;  J'parl' pour parler (1939) ; Bonjour les gars ! (1948) ; J'parle tout seul quand Jean Narrache (1961) ;  Jean Narrache chez le Diable (1963).
   En 1932, il obtint la médaille d'argent de la Société des Poètes canadiens-français.
  Il fut également chroniqueur à la radioSecrétaire du Collège des Pharmaciens de 1945 à 1961, il fut aussi professeur à la Faculté de pharmacie de l'Université de Montréal.
  Émile Coderre est mort à Montréal le 6 avril 1970. Il avait épousé Marie-Rose Tassé le 19 septembre 1921.
(Source principale : Dictionnaire des œuvres littéraires du Québec, tome 2, Montréal, éditions Fides, 1981, p. 1014).   

Pour en savoir plus sur Émile Coderre alias Jean Narrache, voyez :  Paroles retrouvées de Jean Narrache.

D'Émile Coderre, les Poésies québécoises oubliées ont également présenté : ― L'orgue de Barbarie


J'parle tout seul quand Jean Narrache,
recueil d'où est tiré le poème Je présente
ma candidature
, ci-haut.

(Cliquer sur l'image pour l'agrandir)

Dédicace manuscrite de Jean Narrache, dans son
recueil Bonjour les gars !, publié en 1948.

(Collection Daniel Laprès ;
cliquer sur l'image pour l'agrandir)

Un poète et son double, de Richard Foisy,
est certainement l'une des plus belles et des
plus touchantes biographies publiées au
Québec depuis de nombreuses années. Les
Poésies québécoises oubliées la recommandent
chaleureusement. (Informations ICI)  

On peut encore se procurer dans toute
bonne librairie cette excellente anthologie
des oeuvres poétiques et autres écrits
 de Jean Narrache. (Informations ICI)

Émile Coderre est mort à Montréal le 6 avril
1970. Mis à part cette brève notice nécrologique
publiée le lendemain de ses funérailles, il n'y eut
aucune mention de son décès dans les journaux
et médias, et ce, conformément à la volonté du
poète, qui était allergique aux éloges vénaux et
au « fla-fla », comme il aurait sans doute dit.
(Notice nécrologique parue dans
La Presse du 9 avril 1970) 


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