Suaves roses du parterre,
Et vous, tendres œillets qui ravissez les sens,
Apparaissez à la lumière ;
Car Flore vous invite à composer sa cour,
Écoutez son chant d'allégresse.
Qui plus que vous a le droit de contempler le jour ?
N'en ferez-vous pas la richesse ?
Ici tout est calme et serein,
Et de la coupe d'ambroisie
Qu'un ange tient dedans sa main
S'échappe une fleur de vie.
Au ciel chaque plante sourit
Et puis se tresse une couronne ;
Et dans sa joie elle bénit
La sagesse qui la lui donne.
En cet agréable séjour
Fleurissez, fleurissez ; ne craignez pas l'orage
Lorsque l'hiver a eu son tour.
Poète téméraire ! ah ! pourquoi ce langage...
Ne séduisez-vous pas toujours ?
Qu'importe la saison ! ô fleurs ! vous êtes reines
Aux plates-bandes du jardin.
Le vent a beau souffler, ses plus froides haleines
Ne glacent point votre matin.
Brillez à l'éclat de l'aurore,
Brillez à l'étoile du soir,
Et que l'écho répète encore :
« Qu'on est heureux de les revoir ! »
Que d'amants sècheront leurs larmes
Au tendre aspect de vos couleurs.
Croyez-moi, vos parfums, vos charmes,
Hélas ! guériront bien des cœurs.
N'êtes-vous point ces fleurs, filles de mon village,
Aux plus beaux jours de leur printemps,
Que les Muses, l'Amour comblent de leur hommage,
En un pieux enchantement.
Plus pures que les lys, plus belles que les roses,
En vos attraits, en vos vertus,
Laissez-moi vous ranger parmi les saintes choses
Et leurs plus nobles attributs.
Charles Lévesque (6 mai 1852)
Tiré de : Yolande Grisé et Jeanne d'Arc Lortie s.c.o., Les textes poétiques du Canada français, volume 5, Montréal, Fides, 1992, p. 165-166. Le poème est originellement paru dans l'édition du 6 mai 1852 du Moniteur canadien.
Pour en savoir plus sur Charles Lévesque, voyez la notice biographique et les documents sous son poème Le poète malheureux (cliquer sur le titre).
De Charles Lévesque, les Poésies québécoises oubliées ont également présenté : Bienfaits ; Pour le coucher d'un enfant ; Matinée poétique : le rossignol (cliquer sur les titres).
Charles Lévesque (1817-1859), auteur du poème présenté ci-haut, repose au cimetière de Sainte-Mélanie, dans la région de Lanaudière. (Cliquer sur l'image pour l'élargir. Photo : Daniel Laprès, octobre 2021) |
Le poème Les fleurs de Berthier, ci-haut, de Charles Lévesque, est tiré du volume 5 des Textes poétiques du Canada français. (Cliquer sur l'image pour l'élargir) |
Reine Malouin (1898-1976), qui a longtemps animé la vie
poétique au Québec, a affirmé que sans nos poètes d'antan,
« peut-être n'aurions-nous jamais très bien compris la valeur
morale, l'angoisse, les aspirations patriotiques, la forte humanité
de nos ancêtres, avec tout ce qu'ils ont vécu, souffert et pleuré ».
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