Illustration d'Albert Chartier accompagnant le poème Saint-Hétrette qu'on est épais ! dans le numéro de juillet-août 1938 du magazine Can-Can. (Cliquer sur l'image pour l'agrandir) |
On est canayen
Ou ben on l'est pas !
C'est l' 24 juin
Qu'on s'aperçoit d' ça !
* * *
On s'promène dans la rue
Et tout ému,
On admire les "guidounes",
Les marchands d'ballounes,
De sifflets, d'pétards,
De drapeaux et d'étendards !
C't'une atmosphère de fête,
Pis d'mal de tête.
Nos élégants poteaux
Sont pleins d'drapeaux.
Tout l'monde est dehors,
Les conducteurs de chars,
Les ronds-d'cuir, les facteurs,
Les épiciers, les "groceurs",
Les scieux d'bois,
Les marchands d'p'tits pois,
Les charrieux d'eau,
Pis un tas d'bozos !
Y-z-ont à leurs trousses,
Comme des pois en gousse,
Toute une marmaille
Qui s'chamaille,
Et s'barbouille le front
À coup d'suçons !
* * *
Pis c'est la procession
Du p'tit mouton !
R'gâre don' Josée
C'est la police montée...
Oh ! l'beau capitaine!...
Les grosses bedaines
De nos "as de pique"...
V'là not' éch'vin...
Y-a-t-y l'air fin!...
Les chars allégoriques ;
Les p'tits soldats
Qui sont pas d'bois ;
Les beaux cadets
Dret comme des piquets ;
Ceux qui portent les haillons
Du régiment d'Carillon...
Pomme-pomme-paspomme!...
Tiens, v'là la fanfare
De Saint-Édouard...
R'gâre le gros bonhomme!...
Tiens, v'là mon oncle Jos!
Mon Dou, si y'a chaud !...
[...]
Pis c'est l'ptit Batisse suant,
Avec son mouton bêlant!...
Et le rêve est terminé.
Tout s'efface...
La garde d'une race
A passé.
Dans un nuage de gloire,
Une race de poires,
Le visage épanoui,
Se ré-aplaventrit.
Pi on r'tourne se gaver d'sodas,
D'pinottes, pi d'chocolats !
* * *
Et puis c'est l'soir
Du grand jour de gloire !
Tout l'monde s'amène
Au Parc Lafontaine.
Des orateurs bedonnants,
Au milieu d'un grand silence
Jettent les mots vibrants :
"...survivance...
"Race qui n'veut pas mourir...!"
Y faut en rire
Si on veut pas pleurer ;
On a ben plus l'air, madoué,
D'une race de morts-nés
Qu'on a négligé d'enterrer !
Dans l'air enthousiasmé,
C'est les pétards, les fusées,
Les pluies d'lumières,
Les feux, les éclairs...
Tout' un peuple sus son derrière,
R'garde, le nez en l'air !
[...]
Louis B. Champagne* (1938)
Tiré de : Magazine Can-Can**, Montréal, juillet-août 1938, p. 6.
* On ne connaît que peu de choses sur Louis Beaugrand-Champagne, sauf qu'il est né en 1915 et est mort le 30 avril 1991 (voir notice nécrologique ci-dessous), et qu'il a longtemps été impliqué dans diverses activités de type littéraire et culturel, d'abord comme participant au journal étudiant du Collège Jean-de-Brébeuf durant les années 1930, de même qu'à titre de membre du conseil d'administration de la troupe de théâtre Les Compagnons de Saint-Laurent et de divers autres organismes et institutions. Enfin, il était le gendre de J. J. Joubert, fondateur de la laiterie du même nom qui était bien connue à l'époque.
** Le magazine Can-Can a été fondé en décembre 1937 par le dessinateur Albert Chartier (qui créa notamment Onésime) et son ami Marcel Tessier (sur lequel il nous a été impossible de trouver des informations ―il ne s'agit pas de l'historien du même nom―, sauf qu'il était président des Publications Lafayette sous l'égide desquelles paraissait Can-Can). Ayant existé de novembre 1937 à février 1939, ce mensuel fit paraître quatorze numéros et a pu compter sur plusieurs collaborateurs de prestige, dont Gratien Gélinas, Louis Francoeur, Jovette Bernier, Ernest Pallascio-Morin et Robert Choquette. On a notamment dit (voir ICI) que Can-Can s'inspirait du magazine New Yorker.
Le numéro de juillet-août 1938 du magazine Can-Can, d'où est tiré le poème satirique de Louis B. Champagne, Saint-Hétrette qu'on est épais ! (Cliquer sur l'image pour l'agrandir) |
** Le magazine Can-Can a été fondé en décembre 1937 par le dessinateur Albert Chartier (qui créa notamment Onésime) et son ami Marcel Tessier (sur lequel il nous a été impossible de trouver des informations ―il ne s'agit pas de l'historien du même nom―, sauf qu'il était président des Publications Lafayette sous l'égide desquelles paraissait Can-Can). Ayant existé de novembre 1937 à février 1939, ce mensuel fit paraître quatorze numéros et a pu compter sur plusieurs collaborateurs de prestige, dont Gratien Gélinas, Louis Francoeur, Jovette Bernier, Ernest Pallascio-Morin et Robert Choquette. On a notamment dit (voir ICI) que Can-Can s'inspirait du magazine New Yorker.
Notice nécrologique, Le Devoir, 1er mai 1991. |
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