Adalbert Trudel (1911-1992) (Source : BANQ) |
Compagnon du coureur de bois
Bois
En l'honneur de nos grandes plaines
Pleines
D'un beau gibier que nous tuerons.
Romps
Une branche qui se balance
Lance
Quelques couplets d'une chanson,
Son
Entrain si joyeux nous éveille.
Veille
À la chasse et fais tout apprêt
Prêt.
Partons pour la fôret traîtresse,
Tresse
En caribou des bas d'hivers
Verts
Pour mieux marcher sur l'avalanche
Blanche.
Écoute le grand vent du Nord
Mord
Et souffle aux forêts sa rafale
Pâle ;
Habillons-nous de nos manteaux
Chauds.
Sous les érables verts au panache hautain
Dont l'écorce rougeoie aux lueurs du matin,
Foulant tantôt un sol découvert et pierreux,
Rencontrant quelquefois des sauvages peureux ;
Tantôt sous les sapins aux grands rameaux épais
Où demeure en suspens une éternelle paix,
Allons toujours dans notre voyage hardi.
Marchons dans la forêt et l'espace agrandi,
Sans cesse devant nous foulons un sol nouveau,
En y faisant surgir les germes d'un berceau.
Le pays nous a dit : "Taillez-vous dans mon flanc
Un foyer vigoureux ; abattez rang par rang
Les obstacles divers qui naissent sous vos pas,
Et vous frayant toujours à l'aide de vos bras
Un plus large sentier, reculez en marchant
Avec mon horizon celui de votre champ".
Et c'est ainsi que nous mêlons au champ des bois
Des refrains qui meurent et renaissent cent fois.
À nous les bois profonds
Que nous foulons
Dans les vallons ;
À nous, aventuriers,
Les grands sentiers
Des sangliers ;
À nous hardis coureurs
Les bois pleureurs
Et leurs terreurs ;
À nous les sapins verts
Et les hivers
Tout grand ouverts ;
À nous la liberté
Et la gaieté
Des mois d'été ;
Toujours, l'oeil aux aguets,
Aux lieux secrets
De ces forêts ;
Toujours, toujours avant
Dans le grand vent
En le buvant ;
Toujours, toujours courons
Dans les vallons
Où nous mourrons.
Entendez-vous là-bas le cri des grands érables ?
Entendez-vous la voix des sapins misérables ?
Allons voir nos amis de ces vertes forêts,
Allons nous abriter dans les bocages frais.
Amis, le soir descend en étendant son ombre,
Et la forêt s'endort, seule tranquille et sombre.
Arrêtons-nous ici sur un tapis de mousse
Et tendons notre oreille à quelque chanson douce.
Le rossignol prélude au concert de minuit
Et les chantres du jour dont la voix s'attendrit
Bercent les oisillons dans un léger murmure.
Les entendez-vous tous dans la sombre ramure
Accompagner le vent qui fait pencher les nids
D'un son mélodieux et d'un frais gazouillis ?
Comme l'heure du jour, la nuit a son mystère
Et son voile est léger quand il couvre la terre.
Adalbert Trudel * (1929)
Tiré de : Adalbert Trudel, Première Moisson, Québec, Les Éditions du Soleil, 1929, p. 67-70.
* Adalbert Trudel est né à Québec, dans la paroisse Saint-Sauveur, le 10 avril 1911, d'Adalbert Trudel, architecte, et de Maria Brousseau.
Avant même la fin de ses études à Québec, il devint journaliste au quotidien Le Soleil. Encore adolescent, il publia des poèmes dans la revue Le Terroir. Il s'établit ensuite à Montréal, où il fut pigiste pour plusieurs journaux et magazines, dont La Patrie, La Presse et surtout au Petit Journal (1933-35), où il utilisa parfois le pseudonyme « Albert Duc ».
Durant la seconde guerre mondiale, il fut attaché au bureau des relations publiques de l'aluminerie Alcan. Il se remit ensuite à collaborer à divers journaux, dont le Chronicle Telegraph. Il travailla comme traducteur.
Il est l'auteur de deux recueils de poésies, Première Moisson (1929), alors qu'il était âgé de 17 ans et qui lui valut d'être couronné par le concours annuel de la Société des Poètes Canadiens-Français, et Sous la Faucille (1931).
Adalbert Trudel est mort à Québec le 25 août 1992. Il avait épousé Rolande Bourdeau à Montréal le 14 juin 1937.
(Sources : Dictionnaire des œuvres littéraires du Québec, vol. 2, Montréal, éditions Fides, 1987, p. 907 ; Dictionnaire des poètes d'ici de 1606 à nos jours, deuxième édition, Montréal, éditions Guérin, 2005, p. 1290 ; Le Soleil, Québec, 9 avril 1929 et 26 août 1992).
Première moisson, recueil de poésies d'Adalbert Trudel, d'où est tiré le poème La chanson du coureur des bois. Il n'en reste que deux exemplaires sur le marché, voyez ICI. (Cliquer sur l'image pour l'agrandir) |
Signature d'Adalbert Trudel datée de janvier 1930 dans son recueil Première Moisson. (Collection Daniel Laprès) |
Les répertoires et dictionnaires d'écrivains et poètes québécois parus depuis la mort d'Adalbert Trudel, en 1992, ne contiennent pas d'information quant à la date de son décès. Cette notice nécrologique atteste de la date de décès du poète. (Le Soleil, 26 août 1992, sur BANQ) |
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