Cécile Chabot (1907-1990) (Source : Laurentiana) |
La ville n'était plus qu'un bouge de l'enfer.
Les usines crachaient des flammèches de suie
Et les hommes brûlés, torturés en leur chair,
Traînaient sous le ciel rouge un visage de pluie.
Et j'eus le désir fou des étés purs et bleus
Où l'âme se retrouve en face du silence.
Et je m'en suis allée en refermant les yeux.
De nouveau les ouvrant sur mon pays d'enfance,
J'y vois naître des jours lumineux de soleil,
Des jours si transparents qu'on leur croirait des veines
Où bouillonnent, ainsi qu'un sang riche et vermeil,
La lumière enflammée et les chaudes haleines
Des tropiques lointains. Parfois ils ont du miel
Le goût âcre et sucré, les teintes d'ambre et d'orge,
Et quand je mords en eux en regardant le ciel,
C'est tout un champ de fleurs que je goûte en ma gorge.
Et quand je tends les bras sur le seuil du matin
Aux jours enveloppés dans la brume discrète,
Il semble que je bois des grappes de raisin
Dont la chair est déjà sous la peau violette,
Du vin plein de chansons, de rires et d'espoirs.
Et quand ils n'ont plus rien à donner à la terre,
Qu'un peu de sang noirci par les ombres des soirs,
Moi, je les porte encor enrichis de mystère
Et ruisselants de vie et lourds de volupté.
Et tandis que là-bas, sous le soleil qui brûle,
L'homme forge sa nuit, toutes les nuits d'été
En mon coeur ne sont plus qu'un jour sans crépuscule !
Cécile Chabot* (1939)
Tiré de : Cécile Chabot, Vitrail, Montréal, Éditions Bernard Valiquette et Éditions A.C.F., 1940, p. 53-54.
* Cécile Chabot est née le 11 septembre 1907 à L'Annonciation, de Ferdinand Chabot, marchand, et d'Alma Dubreuil. Après avoir passé son enfance et sa jeunesse à Saint-Césaire, elle étudia à l'École des arts et métiers et à l'École des beaux-arts, à Montréal.
Sa vie créatrice se partagea entre l'écriture, la peinture et l'illustration. Elle commença dès 1926 à publier des articles dans divers journaux et revues. Après avoir travaillé quelque temps aux archives du Musée de la province de Québec (aujourd'hui le Musée national des beaux-arts du Québec), elle écrivit une quarantaine de sketches pour Radio-Canada. À partir de 1944, elle fut rédactrice pour l'Association des amis de l'art. Membre de la Société des écrivains canadiens, elle publia divers ouvrages de poésies et de contes, qu'elle illustra elle-même, dont Vitrail (poésie, 1940) ; Légende mystique (1942) ; Paysannerie. Conte des rois ; Imagerie. Contes de Noël (1944) ; Et le cheval vert (1961) ; Contes du ciel et de la terre (1962) ; Cri pour les quatre coins du monde (poésie, 1976) ; Le choix de Cécile Chabot dans l'oeuvre de Cécile Chabot (1983). La qualité de ses ouvrages illustrés lui fit remporter de nombreux prix.
Le fonds Cécile Chabot de la BANQ comprend la plupart de ses ouvrages et manuscrits littéraires, de nombreuses illustrations et oeuvres picturales, de même qu'une volumineuse correspondance avec des écrivains et artistes de son temps, dont Alfred DesRochers, Gabrielle Roy, Germaine Guèvremont, Rina Lasnier, etc.
Cécile Chabot est morte à Montréal le 30 mai 1990. Sa maison natale est commémorée à Rivière-Rouge (secteur de L'Annonciation). À Sherbrooke, son souvenir est honoré par la rue Cécile-Chabot.
(Sources : Claude Corbo (dir.), Livres québécois remarquables du XXe siècle, Québec, Presses de l'Université du Québec, 2012, p. 97-107 ; Dictionnaire des oeuvres littéraires du Québec, tome 2, Montréal, éditions Fides, 1981, p. 1168 ; Dictionnaire Guérin des poètes d'ici de 1606 à nos jours, Montréal, éditions Guérin, 2005, p. 252 ; Dictionnaire des auteurs de langue française en Amérique du Nord, Montréal, éditions Fides, 1989, p. 257).
Le poème Visions d'été, ci haut, est tiré de Vitrail, recueil de Cécile Chabot. Deux exemplaires du recueil, dédicacés par l'auteure, sont encore disponibles, voir ICI et ICI. (Cliquer sur l'image pour l'agrandir) |
Dédicace manuscrite de Cécile Chabot dans son recueil Vitrail. (Collection Daniel Laprès ; cliquer sur l'image pour l'agrandir) |
Œuvre de Cécile Chabot (1944) (Source : Ebay ; cliquer sur l'image pour l'agrandir) |
Arbre, œuvre de Cécile Chabot (sans date) (Source : Askart ; cliquer sur l'image pour l'agrandir) |
Mouettes, œuvre de Cécile Chabot (1944). (Source : Peter Estey Fine Arts ; cliquer sur l'image pour l'agrandir) |
L'artiste-peintre Cécile Chabot à l'oeuvre. (Source : BANQ ; cliquer sur l'image pour l'agrandir) |
Recension de Vitrail, recueil de poésies de Cécile Chabot, par la journaliste et écrivaine Germaine Bernier (pseudonyme « Prisca ») dans Le Devoir du 24 février 1940. De Germaine Bernier, les Poésies québécoises oubliées ont présenté Les grains d'encens. (Source : BANQ ; cliquer sur l'image pour l'agrandir) |
Article paru dans Le Courrier de Saint-Hyacinthe du 16 février 1940 à l'occasion de la parution de Vitrail, de Cécile Chabot. (Source : BANQ ; cliquer sur l'image pour l'agrandir) |
La sortie du recueil Vitrail, de Cécile Chabot, a été soulignée dans le numéro de février 1940 de la revue L'Action nationale. (Source : BANQ ; cliquer sur l'image pour l'agrandir) |
Suite au décès de Cécile Chabot, le chronique littéraire Yves Dubé lui a rendu hommage dans Le Devoir du 9 juin 1990. (Source : BANQ : cliquer sur l'image pour l'agrandir) |
Article paru dans Le Devoir du 31 mai 1990, lendemain du décès de Cécile Chabot. (Source : BANQ ; cliquer sur l'image pour l'agrandir) |
La Presse, 31 mai 1990. (Source : BANQ ; cliquer sur l'image pour l'agrandir) |
Notice nécrologique, Le Devoir, 1er juin 1990. (Source : BANQ ; cliquer sur l'image pour l'agrandir) |
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En réalitée je suis sans mot devant tant de découvertemerci de me permettre de voir que tant de monde avant nous..ce sont exprimez..et laissez tant de beautée..
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