Pamphile Le May (1837-1918) (Source : Québec éternelle, promenade photographique dans l'âme d'un pays, p. 118) |
Qu'apportes-tu, nouvelle année ?
Viens-tu de roses couronnée
Comme la Vierge des amours ?
Ta main tient-elle le calice,
Ou bien la coupe de délice
Où devront s'abreuver nos jours ?
Viens-tu, de mille appâts suivie,
Donner à notre pauvre vie
De nouvelles illusions ?
Ou viens-tu comme un léger rêve
Qui nous enivre, et qui s'achève
En amères déceptions ?
Au pauvre enfant pur comme un ange
Dont le bonheur est sans mélange
D'amertume ni de regrets ;
Qui rit aux baisers de sa mère,
Murmure le nom de son père,
Apportes-tu de beaux jouets ?
As-tu, pour la folle jeunesse,
Une coupe pleine d'ivresse,
Pleine d'espérances et d'amours ?
As-tu quelque limpide étoile
Pour l'éclairer ? Un large voile
Pour jeter sur ses mauvais jours ?
Ou, sur ton aile diaphane,
Pour le jeune coeur qui se fane
Au souffle de l'iniquité,
As-tu quelques rayons de grâce,
Un souvenir que rien n'efface
Du droit chemin qu'il a quitté ?
As-tu quelque douce espérance,
De tout malheureux qui périt ?
Un appui pour la pauvre veuve ?
Pour l'orpheline qui s'abreuve
De pleurs aujourd'hui que tout rit ?
Viens-tu, comme un nuage sombre
Dont on regarde flotter l'ombre
Sur les champs émaillés de fleurs,
Nous apporter ces longs orages
Qui sèment au loin leurs ravages,
Sillonnent et brisent nos coeurs ?
Viens-tu tracer une nouvelle ride
Sur le front pensif et livide
De l'homme qui vit malheureux ?
Briser la main qui le protège
Et mêler des rayons de neige
À l'ébène de ses cheveux ? [...]
Hélas ! Nos rapides années
Ressemblent aux feuilles fanées
Que les vents roulent au vallon !
On les cueillit pour une fête,
On en couronna notre tête,
Puis on les foula du talon.
Pourquoi cette gaieté si vive
Quand la nouvelle année arrive
Et nous éloigne du berceau ?
Sommes-nous las de cette vie ?
Regardons-nous avec envie
Ceux qui dorment dans le tombeau ?
Non ! Non ! faibles enfants des hommes,
Ces pensées, comme des fantômes,
Troubleraient nos esprits peureux !
Non ! Non ! il est si doux de vivre
Quand l'espérance nous enivre,
Même quand on est malheureux !
Chaque nouvel an nous enchante,
Comme l'œil d'une vierge aimante,
Comme le soupir de son coeur.
Nous tressaillons quand il se lève,
Car nous avons cru, dans un rêve,
Qu'il nous apportait du bonheur !
Bonheur ! ... illusion futile !
Songe trompeur ! ombre fragile
Qui fuit quand on croit la tenir !
Hélas ! l'attendrons-nous sans cesse
Du temps qui passe avec vitesse,
Qui passe et qui ne peut revenir !
Pamphile Le May (1865)
Tiré de : Pamphile Le May, Essais poétiques, Québec, G. E. Desbarats Imprimeur-Éditeur, 1865, p. 237-240.
De Pamphile Le May, les Poésies Québécoises Oubliées ont aussi présenté : Le poète pauvre.
Pour en savoir plus sur Pamphile Le May, cliquer ICI.
Essais poétiques, recueil de Pamphile LeMay d'où est tiré le poème La Nouvelle Année, ci-haut. (Cliquer sur l'image pour l'élargir) |
Pamphile Le May avec deux de ses filles et le chien de la famille, probablement à Deschaillons-sur-Saint-Laurent, où il vécut ses dernières années. (Source : BANQ ; cliquer sur l'image pour l'agrandir) |
Plaque en souvenir de Pamphile Le May devant la Chapelle de procession de Saint-Louis, à Lotbinière, où Pamphile Le May est né. (Photo : Daniel Laprès, 2017 ; cliquer sur l'image pour l'agrandir) |
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