mardi 16 janvier 2018

Sous les branches

Gonzalve Desaulniers (1863-1934)

(Source : Les Contemporains : série de biographies
des hommes du jour
, 2e livraison, Montréal,
A. Filiatreault Éditeur, 1899, p. 140)




   Comme pour ramener mes vagues rêveries,
   À l'heure où le couchant étale ses pâleurs
   Et, des pentes du mont aux sillons des prairies,
   Verse ses derniers feux sur les dernières fleurs,

   Je vais au bois parmi mes compagnes, les branches.
   Les arbres sont de vieux amis et j'ai pour eux
   L'amour qu'ont les enfants pour l'aïeule aux mains blanches,
   Qui les endort avec des mots mystérieux.

   Je les connais, je sais leurs noms et leurs usages.
   Ils sont doux au rêveur comme ils le sont aux nids
   Quand l'ombre de leurs troncs patinés par les âges
   Rappelle les oiseaux que l'hiver a bannis. 

   Je leur parle et ma voix humaine les enchante.
   Ils me répondent par des sons que je comprends,
   Car le vent qui parfois dans leur ramures chante
   N'est que l'écho profond de leurs coeurs délirants. 

   Les arbres comme nous naissent, vivent et meurent ; 
   Ils ont des jours sans joie et des jours fériés
   Dans les feuilles que l'air agite et qui demeurent,
   Dans celles que la bise éparpille à leurs pieds. 

   Ils aiment comme nous les aubes sous leurs voiles,
   Les midis plus ardents, les nuits aux mille feux,
   Les heures de soleil et les heures d'étoiles,
   Eux qui boivent le sang d'un sol prodigieux. 

   Hélas ! ne laissons plus, par des mains étrangères,
   Découronner nos bois où la source a pleuré,
   Ces bois que les étés tapissent de fougères
   Et dont l'aède, tant de fois, s'est inspiré. 


                                      Gonzalve Desaulniers (1930)




Tiré de : Gonzalve Desaulniers, Les bois qui chantent, Montréal, Librairie Beauchemin Limitée, 1930, p. 187-189.

Pour en savoir plus sur Gonzalve Desaulniers, cliquer ICI


Les bois qui chantent, recueil contenant le poème Sous les branches

(Cliquer sur l'image pour l'agrandir).

Homme sensible et généreux, Gonzalve Desaulniers est toujours resté
proche du poète Émile Nelligan. On l'aperçoit debout à gauche, en 1932,
chez lui dans le quartier Ahuntsic, à Montréal, en compagnie de sa fille,
de l'écrivaine Anne-Marie Gleason-Hughenin (nom de plume "Madeleine"), 

d'Émile Nelligan (assis) et du comédien Camille Ducharme.

(Source : La vie littéraire au Québec, tome VI, Québec, Presses de
l'Université Laval, 2010, p. 68 ; cliquer sur l'image pour l'agrandir).


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