dimanche 31 mars 2019

Le Chien d'or

Le bas-relief du Chien d'or, sur le fronton de l'édifice de l'ancien
bureau de poste de Québec, avec son énigmatique épigraphe :

Je suis un chien qui ronge lo
En le rongeant je prend mon repos
Un tems viendra qui n'est pas venu
Que je morderay qui maura mordu 


(Source : Wikipedia)




   Épigraphe sanglant d'un drame ensanglanté,
   Aux parois de ces murs quelle main t'a jeté ?
   Osas-tu, noble élan d'une vengeance active,
   Sarcasme audacieux, défier l'oppresseur ?
   D'une épouse éplorée es-tu la voix plaintive,
   Ou le cri d'un mourant qui demande un vengeur ?
   Volcan des passions où la vertu s'abîme, 
   Vous, haine, jalousie, amour, cupidité, 
   Qui d'entre vous dicta cette page de crime ?
   L'on ne sait !... L'oeuvre est là, le drame est attesté; 

   Vengeance, assassinat y doivent trouver place ;
   Philibert meurt percé du fer d'un assassin
   Qui fuit, mais au vengeur ne peut cacher sa trace ;
   Car le sang demandé ne le fut pas en vain.
   Le temps n'ose frapper le Chien d'or de son aile ;
   Il reste plus entier que le fait qu'il rappelle.
   Le drame est au roman, qui, voulant de l'effet,
   Du vrai comme du faux à sa guise dispose ;
   Tandis qu'aux murs vieillis, gardant un sens complet,
   L'énigme encore subsiste, et nous dit quelque chose.

                               François-Réal Angers* (1840)




Tiré de : Le Répertoire national, ou recueil de littérature canadienne, compilé par James Huston, tome 2, deuxième édition, Montréal, J. M. Valois & Cie, 1893, p. 158. Sous le poème est inscrite la mention suivante : « Ces vers sont extraits d'un volume manuscrit de M. Jacques Viger, sur l'histoire du Chien d'or ». 

*  François-Réal Angers est né à Neuville, comté de Portneuf, le 20 novembre 1812, de François Angers, cultivateur, et Marie des Anges Larue. Il fit ses études classiques au Petit Séminaire de Québec, où il fut l'un des fondateurs (9 décembre 1830) de la première société littéraire de l'institution.
   Durant ses études en droit, il publia à compte d'auteur son Système de sténographie applicable au français et à l'anglais, ce qui explique sans doute nomination au poste de rapporteur officiel des débats de la Chambre d'assemblée du Bas-Canada, peu après son admission au Barreau le 6 octobre 1837.
   Vers la même époque, il publia dans divers journaux des poèmes, qui ont été conservés dans les deux premiers tomes du Répertoire national, qui fut compilé par James Huston. En 1837, il publia un récit romancé d'une affaire criminelle ayant fait sensation à l'époque, Les Révélations du crime, ou Cambray et ses complices (on peut toujours se procurer dans toute bonne librairie cet enlevant récit re-publié aux éditions Nota Bene).
   De 1845 à 1848, il fut coéditeur de la Revue de législation et de jurisprudence. En 1850-1851, il fut président de l'Institut canadien de Québec. Il défendit les censitaires devant la Cour seigneuriale présidée par le juge en chef Louis-Hippolyte La Fontaine. En 1856, il collabora à la publication des Décisions des tribunaux du Bas-Canada
   François-Réal Angers est mort à Québec le 23 mars 1860. Il avait épousé Louise-Adèle Taschereau le 4 avril 1832, puis en secondes noces Marie-Louise Panet le 23 novembre 1853. Il était l'oncle de William Chapman, dont les Poésies québécoises oubliées ont présenté le poème À Percé
(Sources principales : Dictionnaire des oeuvres littéraires du Québec, tome 1, Montréal, éditions Fides, 1980, p. 655 ; Wikipedia)

Pour en savoir plus sur François-Réal Angers, cliquer ICI

Richard Couture, ancien guide touristique de Québec, nous a aimablement transmis cette version de la légende du Chien d'or : 

   « Avant la construction de l'ancien bureau de poste, qui est l'édifice Louis-Saint-Laurent actuel, se trouvait la maison Philibert, construite vers 1688 par Timothée Roussel (chirurgien originaire de Montpellier et attaché à l'Hôtel-Dieu où il mourut en 1700), sur un terrain qu'il avait acquis en 1673. Ses héritiers vendirent la propriété en 1734 à Nicolas Jacquin dit Philibert, un Lorrain originaire de Martigny-les-Bains expatrié en Nouvelle-France et qui travaillait alors en tant que munitionnaire du Roi.

   En 1748, à la suite d'une dispute futile au sujet d'un billet de logement avec l'aubergiste Philibert, Pierre Jean-Baptiste François-Xavier Le Gardeur de Repentigny, fils de Jean-Baptiste René le Gardeur de Repentigny et de Marie-Catherine Juchereau de Saint-Denys, porta un coup d'épée à l'aubergiste qui lui fut fatal.
  Le Gardeur de Repentigny, protégé par ses amis, réussit à fuir le même jour pour se réfugier au Fort Saint-Frédéric.
   La légende raconte que la veuve, demeurée inconsolable de la mort de son mari, fit graver au-dessus de la porte de sa maison, rue de Buade, l'effigie d'un  chien rongeant son os ayant pour texte en dessous : « Je suis un chien qui ronge lo. En le rongeant je prend mon repos. Un tems viendra qui n'est pas venu, Que je morderay qui maura mordu ». Ayant élevé ses enfants dans la haine de l'assassin de leur père, elle leur répéta chaque jour que, plus tard, lorsqu'ils seront grands, ils auront le devoir de venger leur père.
   Toujours selon cette légende, le fils de Philibert, alors âgé de 22 ans, partit à la recherche de l'assassin de son père et le retrouva aux Indes françaises, à Pondichéry. Il provoqua Le Gardeur de Repentigny et duel et le tua d'un coup d'épée. La vengeance était accomplie ». 

   
Pour en savoir plus sur la légende du Chien d'or, cliquer ICI et ICI.


François-Réal Angers (1812-1860)
Auteur du poème Le Chien d'or, ci-haut.

(Source : Répertoire national, tome 1)

Le poème Le Chien d'Or, de
François-Réal Angers, a été
publié dans le tome 2 du
Répertoire national

(Cliquer sur l'image pour l'agrandir)

Le bas-relief du Chien d'or, tel qu'il apparaît de nos jours sur
le fronton de l'édifice du vieux bureau de poste de Québec.

(Source : Wikipedia ; cliquer sur l'image pour l'agrandir)

Le Chien d'or, visible au-dessus des colonnes de la façade
du vieux bureau de poste de Québec.

(Source : Wikipedia ; cliquer sur l'image pour l'agrandir)

Vue d'ensemble du vieux bureau de poste de Québec,
au fronton duquel se trouve le bas relief du Chien d'or.

(Source : Wikipedia ; cliquer sur l'image pour l'agrandir)

Notice nécrologique parue le 29 mars 1860
dans Le Journal de Québec. François-Réal
Angers a été inhumé à Neuville, dont le nom
était autrefois Pointe-aux-Trembles, dans la
région de Portneuf.

(Source : BANQ)

Cet article paru dans Le Journal de Québec du 3 avril 1860 fait état de résolutions
adoptées par le Barreau de Québec pour déplorer la mort de François-Réal Angers.

(Source : BANQ ; cliquer sur l'image pour l'agrandir)


Procurez-vous l'un des quelques exemplaires encore disponibles 
de Nos poésies oubliées, un volume préparé par le concepteur 
du carnet-web des Poésies québécoises oubliées, et qui présente
100 poètes oubliés du peuple héritier de Nouvelle-France, avec
pour chacun un poème, une notice biographique et une photo
ou portrait. Pour se procurer le volume par Paypal ou virement 
Interac, voyez les modalités sur le document auquel on accède
en cliquant sur l'image ci-dessous. Pour le commander par
VISA, cliquer ICI.

jeudi 28 mars 2019

Le vieux cadran du Séminaire

Le vieux cadran du Vieux Séminaire
de Saint-Sulpice
, au Vieux-Montréal.


« ... Le jour sa belle âme transpire,
car le soleil le fait sourire...»

(Photo : Daniel Laprès, 26 mars 2019)



                   Il se souvient.


   Que fait là-haut, coi, solitaire,
   Sur ce vieux mur sombre, froncé,
   Ce vieux cadran couleur de terre ?
   ― Que fait-il ? ― Rien. Que peut-il faire ?
   ― Il se souvient d'un long passé
          Bien délaissé.

   Il se tait jusqu'à l'éloquence ;
   Et s'il desserre aussi les dents,
   Il converse de préférence, 
   À cause de la morgue des vivants,
          Avec les vents. 

   Ce que ce rêveur peut bien dire,
   Montréal devrait le savoir.
   Le jour sa belle âme transpire, 
   Car le soleil le fait sourire ;
   Mais il ne parle que le soir, 
          Quand il fait noir. 

   Émouvante est sa voix éteinte
   Qu'exaspère son coeur vibrant :
   On pourrait comparer la plainte
   Du bronze qui dans la nuit tinte
   Et dont le glas s'en va mourant,
          Au ton qu'il prend. 

   Une obsédante souvenance
   De jours à jamais révolus
   Le rend mélancolique : il pense
   À leur définitif silence,
   Et, lourd de regrets superflus,
          Ne marche plus.

   Il dit tout bas : « Mon terme approche ;
   « L'angoisse m'envahit ; je sens
   « Mon marteau lourd comme une roche,
   « Mes refrains figés dans ma cloche,
   « Et vois, pensif, sur mes vieux ans
          « Passer le temps ».

   Sait-on que l'hiver en furie
   Déride ce désenchanté ?...
   Si quelque soir la poudrerie,
   Blanchâtre fantasmagorie,
   Étend son grand voile agité
          Sur la cité,

   Alors les filles de Mémoire
   Animent sa face de bois ;
   Et, comme trêve à l'humeur noire,
   L'écho de l'émouvante histoire
   Que vécut la ville autrefois,
          Remplit sa voix. 

   [...]

   Sa voix, enthousiaste ou sombre,
   Laisse les coeurs indifférents...
   Lorsqu'on a vu des jours sans nombre,
   On n'a plus que le vent et l'ombre
          Pour confidents.

                 Arthur Guindon, p.s.s.* (1922)




Tiré de : Arthur Guindon, Aux temps héroïques, Montréal, 1922, p. 269-271 et 286. Les extraits ci-haut présentent l'introduction et l'épilogue de ce long poème épique.

*  Arthur Guindon est né le 12 janvier 1864 à Saint-Polycarpe, de Michel Guindon, commerçant, et de Marie-Louise Bazanaire. Après ses études classiques au Collège de Montréal, il étudia la théologie au Grand Séminaire de Montréal et au Séminaire Saint-Sulpice, à Issy-les-Moulineaux (France). Ordonné prêtre le 21 septembre 1895, il étudia un an à Paris et entra, en 1896, chez les Sulpiciens à Issy.
   Professeur de mathématiques au Collège de Montréal en 1897, il y occupa le poste d'économe de 1898 à 1906, puis de vice-procureur de 1906 à 1908, alors qu'il fut nommé vicaire à Notre-Dame-de-Montréal.
   En 1920, il publia En mocassins, une étude sur les sociétés et l'univers mythologique des Amérindiens, puis, en 1922, Aux temps héroïques, un recueil de poésies traitant d'épisodes de l'histoire de Nouvelle-France et de contes et légendes issues du passé québécois. En 1923, l'année de sa mort, il publia Les trois combats du Long-Sault. Il a également écrit les paroles d'un chant patriotique, « Le départ des braves du Long-Sault », mis en musique par A. de Liercourt. 
   Dans leur anthologie La poésie québécoise des origines à nos jours, Laurent Mailhot et Pierre Nepveu ont écrit : « [...] La poésie d'Aux temps héroïques possède une rare force d'évocation et un sens de l'image qui justifient qu'on la tire de l'oubli ». 
   Peintre et dessinateur, il a produit une quarantaine d'oeuvres picturales, dont 14 huiles sur toile et 26 dessins. Ces oeuvres sont conservées à la collection des Sulpiciens à Montréal.
   Arthur Guindon est mort à Montréal le 26 juillet 1923.
(Sources : Dictionnaire des oeuvres littéraires du Québec, tome 2, Montréal, éditions Fides, 1981, p. 433 ; Laurent Mailhot et Pierre Nepveu, La poésie québécoise des origines à nos jours, Montréal, Les Éditions de l'Hexagone et Sillery, Les Presses de l'Université du Québec, 1981, p. 127 ; Wikipedia).

Pour en savoir plus sur Arthur Guindon, cliquer ICI. On peut aussi consulter ICI l'article que la revue L'Action française, de Montréal, lui consacra à l'occasion de son décès.


Arthur Guindon, p.s.s. (1864-1923)
(Source : Arthur Guindon, sulpicien :
artiste et humaniste
)

 Le poème Le vieux cadran du Séminaire, ci-haut
est tiré du recueil Aux temps héroïques, d'Arthur
Guindon. Un exemplaire de l'édition originale
est encore disponible sur le marché, voir ICI.
On peut en télécharger gratuitement un
exemplaire ICI.

(Cliquer sur l'image pour l'agrandir)

« Il ne parle que le soir
Quand il fait noir. [...]
Sait-on que l'hiver en furie
   Déride ce désenchanté ?... »

Dessin d'Arthur Guindon accompagnant le
poème Le vieux cadran du Séminaire
dans son recueil Aux temps héroïques.

(Cliquer sur l'image pour l'agrandir)

Le vieux Séminaire de Saint-Sulpice, au Vieux-Montréal, avec son vieux cadran, est l'un des
plus vieux édifices (1684) sur l'île de Montréal. Arthur Guindon y est décédé le 26 juillet 1923.

(Photo Daniel Laprès, 26 mars 2019 ; cliquer sur l'image pour l'agrandir)

Arthur Guindon à la fin des années 1890.

(Source : Le Diocèse de Montréal
à la fin du XIXe siècle
, Montréal,
Eusèbe Senécal et Cie Imprimeur-
Éditeur, 1900, p. 72)

Article paru dans La Presse du 26 juillet 1923,
à l'occasion de la mort d'Arthur Guindon.

(Source : BANQ ; cliquer sur l'image pour l'agrandir)

Le Devoir, 26 juillet 1923

(Source : BANQ ; cliquer sur l'image pour l'agrandir)


Procurez-vous l'un des quelques exemplaires encore disponibles 
de Nos poésies oubliées, un volume préparé par le concepteur 
du carnet-web des Poésies québécoises oubliées, et qui présente
100 poètes oubliés du peuple héritier de Nouvelle-France, avec
pour chacun un poème, une notice biographique et une photo
ou portrait. Pour se procurer le volume par Paypal ou virement 
Interac, voyez les modalités sur le document auquel on accède
en cliquant sur l'image ci-dessous. Pour le commander par
VISA, cliquer ICI.

lundi 25 mars 2019

Aux chevaliers du noeud coulant

Rémi Tremblay (1847-1926)

(Source : son recueil Boutades
et rêveries
, 1893)




   Enfin vous l'avez eu votre jour de victoire ;
   Vous avez souffleté la patrie aux abois,
   Pour vous, la trahison est un titre de gloire,
   Vous prodiguez l'opprobre au noble sang gaulois.
   Honte éternelle à vous, renégats, mercenaires
   Pour qui le vil métal est la suprême loi !
   Courtisans d'une secte aux instincts sanguinaires,
   Traîtres au sol natal, traîtres à votre foi, 
   Enfants dégénérés d'une race virile,
   Conçus par l'intérêt, enfantés par la peur,
   Battez des mains, riez, ô phalange servile :
   On nous prend, grâce à vous, pour un peuple sans coeur.
   Vous qui d'un zèle outré nous donnâtes la preuve,
   Quand la patrie en deuil appela ses enfants,
   Vous nous avez trahis au moment de l'épreuve,
   Et vous rampez aux pieds des vainqueurs triomphants.

   En dépit du courroux que vous fîtes paraître,
   Quand le sang d'un martyr eut rougi l'échafaud,
   On vous a vu bientôt, sur un signe du maître,
   Insulter la victime, exalter le bourreau.
   Depuis lors, piétinant sur le cadavre inerte
   De celui qui mourut pour défendre les siens,
   Vous n'avez eu qu'un but : consommer notre perte.
   Triomphez aujourd'hui, vils politiciens !
   Ah ! vous avez voulu nous traîner dans la boue
   Et souiller dans le sang votre immonde drapeau !
   Aux soufflets de vos chefs présentant notre joue,
   Vous nous avez livrés comme on livre un troupeau !
   Eh bien ! vos propres fils, évoquant la mémoire
   De vos tristes exploits, seront saisis d'horreur,
   Car vos ignobles noms, abhorrés dans l'histoire,
   Rediront notre honte et votre déshonneur.

                                   Rémi Tremblay(Stoke, 26 février 1887)



Tiré de : Rémi Tremblay, Coups d'aile et coups de bec, Montréal, Imprimerie Gebhardt-Berthiaume, 1888, p. 70-71. Également publié dans Rémi Tremblay, Aux chevaliers du noeud coulant, édition établie, présentée et annotée par Jean Levasseur, Québec, Presses de l'Université Laval, 2007, p. 110-111.

*  Né à Saint-Barnabé, près de Saint-Hyacinthe, le 2 avril 1847, de François-Xavier Tremblay, patriote de 1837 ayant pris part à la Bataille de Saint-Denis, et de Sophie Vandandaigne dit Gadbois, Rémi Tremblay, journaliste, militaire, traducteur, poète, écrivain, chansonnier, satiriste, globe-trotter, était l'un des intellectuels les plus atypiques et les plus indépendants d'esprit de l'histoire du Québec.
   Alors qu'il avait douze ans, en 1859, sa famille s'installa à Woonsocket, au Rhode Island, où se trouvait une importante communauté canadienne-française. En 1863, alors que la Guerre civile américaine faisait rage et que lui-même n'avait que 15 ans, Tremblay s'enrôla dans l'armée du Nord. Fait prisonnier en 1864, il parvint à s'évader et se rendit à Montréal, où il s'incrivit à l'école militaire, dont il obtint un diplôme d'officier. Après son mariage à Woonsocket avec Julie Lemery, le 26 octobre 1868, il exerça divers métiers, tant aux États-Unis qu'au Québec, où il s'installa à Stoke, dans les Cantons de l'Est, où il possédait une terre agricole.
    À partir de 1877, il collabora à divers journaux, dont La MinerveLa Gazette de JolietteLe Courrier de Montréal, etc. En 1880, il s'établit à Ottawa, où il travailla comme traducteur des débats de la Chambre des Communes. À cause d'un virulent poème, intitulé Aux chevaliers du noeud coulant, qui dénonçait les pendeurs de Louis Riel, il fut censuré et perdit son poste de traducteur. Il fut ainsi le premier écrivain censuré de l'histoire du régime fédéral canadien établi en 1867.
   Revenu à Montréal en 1888, il collabora au journal L'Étendard, puis assuma la rédaction de La Justice, de Québec, mais fut de retour à Montréal dès 1890 où, jusqu'en 1892, il fut journaliste auprès de divers journaux et périodiques. Il partit ensuite pour le Massachusetts, d'abord à Fall River (1893) puis à Worcester (1894), où il fut rédacteur du journal L'Opinion publique. En 1896, il s'installa de nouveau à Ottawa, où il redevint traducteur pour la Chambre des Communes.
   Il est l'auteur des volumes suivants : Chansonnier politique du Canard (1879) ; Caprices poétiques et chansons satiriques (1883) ; Un revenant : épisode de la Guerre de sécession aux États-Unis (1884) ; Coups d'ailes et coups de bec (1888) ; Boutades et rêveries (1893) ; Vers l'idéal (1912) ; Pierre qui roule (1923) ; Mon dernier voyage à travers l'Europe (1925).
   Rémi Tremblay, qui fit durant sa retraite deux fois le tour du monde avec Alida Charlebois, sa seconde épouse qu'il a mariée en 1897, est mort le 30 janvier 1926 à l'hôpital Saint-Claude de la Pointe-à-Pitre, en Guadeloupe, où il séjournait pour l'hiver sur recommandation de son médecin. Il était le père du journaliste, écrivain et poète Jules Tremblay, dont les Poésies québécoises oubliées ont présenté Les Névades.

De Rémi Tremblay, les Poésies québécoises oubliées ont également présenté : Je me souviens

Les Glanures historiques québécoises ont publié des extraits des mémoires de Rémi Tremblay, sur le thème de la servitude du peuple québécois ; voir ICI

Pour en savoir plus sur Rémi Tremblay, cliquer ICI


Aux chevaliers du noeud coulant, ci-haut,
est tiré de Coups d'ailes et coups de bec,
recueil de poésies de Rémi Tremblay. Cet
exemplaire porte une dédicace manuscrite
 de l'auteur. On peut ICI télécharger
gratuitement le recueil.

(Collection Daniel Laprès ;
cliquer sur l'image pour l'agrandir)

Aux chevaliers du noeud coulant est aussi
le titre du recueil de l'intégralité des poésies
et chansons de Rémi Tremblay, dont
 bon 

nombre sont politiques et satiriques, que 
les Presses de l'Université Laval ont publié 
en 2007. Cet ouvrage est toujours disponible 
en librairie. Pour informations, voir ICI.

(Cliquer sur l'image pour l'agrandir)

C'est pour venger la pendaison de Louis Riel,
le 16 novembre 1885, que Rémi Tremblay
composa le poème Aux chevaliers du
noeud coulant
, ci-haut.

(Source : Wikipedia
)

Rémi Tremblay publia Aux chevaliers du noeud coulant dans son recueil Coups
d'ailes et coups de bec
, qui est paru en 1888. Sous le poème, en page 70,
l'auteur avait pris soin d'ajouter cette note sarcastique évoquant le fait que le
poème avait été lu à la Chambre des Communes par des députés qui voulaient
embarrasser le gouvernement MacDonald qui avait été en faveur de la la
mise à mort de Louis Riel, et que, par conséquent, le poème était paru dans
le journal des débats de la Chambre. En conséquence de son poème, Rémi
Tremblay fut congédié de son poste de traducteur de la Chambre. II raconte
l'épisode dans son recueil de souvenirs Pierre qui roule

Article paru dans La Presse du 1er février 1926, à l'occasion du décès de Rémi Tremblay.
Le sous-titre « Carrière mouvementée » n'est pas une exagération.

(Source : BANQ ; cliquer sur l'image pour l'agrandir)

Entrefilet paru dans Le Devoir
du 1er février 1926.

(Source : BANQ ; cliquer
sur l'image pour l'agrandir)


Procurez-vous l'un des quelques exemplaires encore disponibles 
de Nos poésies oubliées, un volume préparé par le concepteur 
du carnet-web des Poésies québécoises oubliées, et qui présente
100 poètes oubliés du peuple héritier de Nouvelle-France, avec
pour chacun un poème, une notice biographique et une photo
ou portrait. Pour se procurer le volume par Paypal ou virement 
Interac, voyez les modalités sur le document auquel on accède
en cliquant sur l'image ci-dessous. Pour le commander par
VISA, cliquer ICI.

jeudi 21 mars 2019

Hymne à la poésie

Marie Ratté (1904-1961)

(Photo : Amos Carr, Hollywood)




   Divine poésie, élue à mon aurore,
   Et qui devait grandir encore avec le jour,
   Ma mère m'enseigna ton nom doux et sonore !
   C'est toi que je buvais sur ses lèvres d'amour. 

   C'est toi qui me donnas mon âme débordante,
   Mon âme qui s'étonne, afin de s'exalter,
   En plongeant au secret de la nature ardente ;
   Qui se meurt de désirs, et qui voudrait chanter !

   Chanter ! oh ! te chanter, auguste poésie !
   Avec l'hymne des cieux, l'azur du firmament, 
   Préparer pour ta fête un festin d'ambroisie
   Qui ferait de mes jours un éternel moment.

   Chanter ! je te chantais, sublime enchanteresse,
   Alors que tu flottais dans mes tresses au vent !
   Osant te bégayer quelques mots de tendresse,
   Je te voyais sourire à mon désir fervent. 

   C'est toi qui m'attendais quand, rêveuse fillette,
   J'allais seule m'asseoir, le jour, au bord des flots,
   Toi qui me fascinais au sein de la tempête,
   En rêvant aux lointains et sombres matelots !

            Obsession, délire, extase,
            Ô grave appel des profondeurs !
            Mon âme était comme le vase
            Où bouillaient de sourdes ardeurs ;
            Mon âme était comme une lyre ;
            Comme une enfant qui savait lire,
            Heureuse, avide de savoir :
            Je voulais l'énigme du monde,
            Je l'appelais du fond de l'onde,
            Comme d'un transparent miroir.

            Ô vision ! ô poésie !
            Sourire ému de l'Éternel,
            Ta douce image m'a saisie,
            Dis-moi le monde solennel.
            Dis-moi le monde où l'homme passe,
            Où le coeur avide ramasse
            Les miettes de son paradis ;
            Ne pouvant saisir le mystère,
            Répands ta vertu salutaire
            Sur le morne esprit engourdi. 

            Jette-nous la sainte espérance,
            Ailes de feu de l'avenir ;
            Reste consoler la souffrance
            Avec le sacré souvenir ;
            Que ce passé digne d'envie, 
            Noblesse grave de la vie, 
            Réapparaisse en mon chemin. 
            La route montante est mauvaise ;
            Pour que, toujours, mon coeur s'apaise,
            Comme autrefois, tends-moi la main. 

            Que n'ai-je la voix pour redire
            Ton nom béni, ton nom divin.
            Comment pourrais-je te décrire,
            Archet puissant du coeur humain ?
            Musique, lèvres inspirées,
            Lointain écho des empyrées,
            Pain de l'esprit et vin du coeur ?
            Humaine, faible, impuissante,
            Je sens ma plume frémissante
            À ton seul nom, fier et vainqueur.

   Oh ! m'inspirer de toi jusqu'à l'aube plénière,
   Où l'âme de la terre entrera dans l'azur
   Oublier les douleurs de l'heure journalière
   En toi, qui sait louer le dur devoir obscur. 

   Oh ! m'enivrer de toi dans les plaines du monde,
   Croire à toute beauté, au bonheur des désirs,
   Croire à la volupté infinie et profonde
   Qui germe dans la coupe âcre de nos soupirs.

   De claires visions, inonder ma prunelle,
   Goûter la joie de vivre et sa diversité,
   Mourir en évoquant ta promesse éternelle,
   Éclose dans mon coeur où vit l'immensité. 

                              Marie Ratté (novembre 1927)



Tiré de : Marie Ratté, Au temps des violettes, Beauceville, L'Éclaireur Limitée, 1928, p. 5-8.


Pour en savoir plus sur Marie Ratté, voyez la notice biographique, ainsi que les documents et photos sous son poème Si l'espoir, que les Poésies québécoises oubliées ont également présenté. Voyez aussi les documents ci-dessous.

Le 22 juillet 2019 à 15 heures, à Baie-des-Sables, village natal de Marie Ratté, la poétesse sera commémorée dans le cadre des fêtes du 150e anniversaire de la municipalité. Une conférence et une lecture de certains de ses poèmes auront alors lieu. Pour de plus amples informations, voyez ICI


L'Hymne à la poésie, ci-haut, est tiré du recueil
Au temps des violettes, de Marie Ratté.

Dédicace manuscrite de Marie Ratté dans
son recueil Au temps des violettes.

(Collection Daniel Laprès)

Dans le journal Le Soleil du 24 mars 1928, le poète-cultivateur Joseph Harvey
a publié cette recension du recueil Au temps des violettes, de Marie Ratté.

De Joseph Harvey, les Poésies québécoises oubliées ont présenté Songe intime.

(Source : BANQ ; cliquer sur l'image pour l'agrandir)

Article paru dans Le Bulletin des
Agriculteurs
du 15 mars 1928.

(Source : BANQ ; cliquer sur l'image pour l'agrandir)

Article de l'écrivain et journaliste Harry Bernard 
dans Mon Magazine, numéro de mars 1929.

(Source : BANQ ; cliquer sur l'image pour l'agrandir)

Le 11 septembre 1936, dans Le Progrès du Golfe, de Rimouski, Marie Ratté publiait
ce compte-rendu d'un voyage qu'elle avait effectué à Colon, au Panama.

(Source : BANQ ; cliquer sur l'image pour l'agrandir)


Les voix de nos poètes oubliés nous sont désormais rendues. 
Le concepteur de ce carnet-web a publié l'ouvrage en deux 
tomes intitulé Nos poésies oubliées, qui présente 200 de
de nos poètes oubliés, avec pour chacun un poème, une
notice biographique et une photo ou portrait. Chaque  
tome est l'objet d'une édition unique et au tirage limité. 
Pour connaître les modalités de commande de cet 
ouvrage qui constitue une véritable pièce de collection
cliquez sur cette image :