Alphonse Désilets (1888-1956) (Source : Un poète et son double) |
Hé ! oui. L'ombre seule aujourd'hui
Réside en la vieille demeure.
Aussi la voit-on d'heure en heure
S'affaisser de peine et d'ennui,
Pauvre vieille demeure !
Elle a pourtant si bien chéri
Ceux qui, naguère, sous son aile
Ont, vivant d'amour avec elle,
Pleuré parfois et souvent ri !
Et, bien que les oiseaux, l'âme ivre d'allégresse,
Reviennent se poser au faîte de son toit
Et qu'il chantent joyeux et fous comme autrefois,
Elle n'en garde pas moins son air de tristesse.
Car son cœur ne bat plus et ses beaux yeux sont clos
Depuis qu'on a masqué ses châssis sous des planches
Et que ne s'ouvrent plus ses vieilles portes blanches
Si faraudes à voir à travers les bouleaux.
Son perron, tant de fois égayé par le rire
Des enfants et des gars qui badinaient d'amour
Aux filles du fermier, n'a plus à cœur de dire
Au soleil matinal son allègre bonjour !
Aussi, nul ne viendra des vieux du voisinage
Jaser avec les anciens qu'elle protégea.
On l'a bien oubliée. Elle est seule. Et déjà
Elle se sent mourir de peine et de veuvage.
Le poète est l'unique amant
Qui se souvienne parfois d'elle
Et qui rende visite à celle
Dont l'âme est triste infiniment...
L'ombre dans l'ancienne demeure
Seule, hélas ! habite aujourd'hui !
Aussi la voit-on, d'heure en heure,
S'en aller de peine et d'ennui,
Pauvre vieille demeure !
Alphonse Désilets* (1913)
Tiré de : Alphonse Désilets, Mon Pays, mes Amours, Montréal, 1913, p. 28-29.
Depuis qu'on a masqué ses châssis sous des planches
Et que ne s'ouvrent plus ses vieilles portes blanches
Si faraudes à voir à travers les bouleaux.
Son perron, tant de fois égayé par le rire
Des enfants et des gars qui badinaient d'amour
Aux filles du fermier, n'a plus à cœur de dire
Au soleil matinal son allègre bonjour !
Aussi, nul ne viendra des vieux du voisinage
Jaser avec les anciens qu'elle protégea.
On l'a bien oubliée. Elle est seule. Et déjà
Elle se sent mourir de peine et de veuvage.
Le poète est l'unique amant
Qui se souvienne parfois d'elle
Et qui rende visite à celle
Dont l'âme est triste infiniment...
L'ombre dans l'ancienne demeure
Seule, hélas ! habite aujourd'hui !
Aussi la voit-on, d'heure en heure,
S'en aller de peine et d'ennui,
Pauvre vieille demeure !
Alphonse Désilets* (1913)
Tiré de : Alphonse Désilets, Mon Pays, mes Amours, Montréal, 1913, p. 28-29.
* Alphonse Désilets est né le 5 avril 1888 à Victoriaville, de Théode Désilets, ouvrier, et de Virginie Hamelin. Il fit ses études primaires et commerciales à l'Académie du Sacré-Coeur de Victoriaville et son cours classique au Séminaire de Nicolet. Il poursuivit des études d'agronomie à l'Institut agricole d'Oka et au Collège agricole de Guelph, Ontario. Il obtint son diplôme d'ingénieur agronome de l'Université Laval de Montréal le 19 décembre 1913.
Il fut nommé, en 1915, agronome du district de Québec-Montmorency et directeur des Cercles des Fermières, dont il est reconnu comme étant le fondateur. Il fut également chef du bureau du placement agricole pour le gouvernement provincial.
Il fut nommé, en 1915, agronome du district de Québec-Montmorency et directeur des Cercles des Fermières, dont il est reconnu comme étant le fondateur. Il fut également chef du bureau du placement agricole pour le gouvernement provincial.
Directeur de la rédaction au Bulletin de la ferme, il collabora à plusieurs journaux et périodiques. Pendant sa carrière de fonctionnaire, il se fit un ardent défenseur du régionalisme et de l'agriculture.
Alphonse Désilets est mort à Québec le 5 octobre 1956. Il avait épousé Rolande Savard le le 8 juin 1916.
(Source : Dictionnaire des œuvres littéraires du Québec, volume 1, Montréal, éditions Fides, 1980, p. 556).
Alphonse Désilets est mort à Québec le 5 octobre 1956. Il avait épousé Rolande Savard le le 8 juin 1916.
(Source : Dictionnaire des œuvres littéraires du Québec, volume 1, Montréal, éditions Fides, 1980, p. 556).
Peut-être inspirée par le mépris aussi hautain que pédant à l'égard de notre littérature du terroir et qui est si caractéristique de l'insipide caste qui, depuis la prétendue "révolution tranquille", s'est accaparée à peu près tout le magistère littéraire au Québec, la sèche notice biographique qui précède rend assez mal justice au poète qu'était Alphonse Désilets et à son rôle d'animateur, voire de cheville ouvrière au sein des cercles poétiques québécois de l'époque. On n'y apprend même pas qu'il était poète et qu'il a produit des recueils de poésies, entre autres publications. Ainsi donc, il semble que Lord Durham ait trouvé de zélés continuateurs pour perpétuer sa prétention selon laquelle nous ne serions qu'un peuple sans histoire ni littérature.
Pour mesurer avec davantage de justesse la contribution de Désilets à la littérature de chez nous, on peut lire ce que disait de lui le merveilleux et grand poète Alfred DesRochers (1901-1978), lors d'une conférence qu'il a donnée à Montréal en 1954 :
Pour mesurer avec davantage de justesse la contribution de Désilets à la littérature de chez nous, on peut lire ce que disait de lui le merveilleux et grand poète Alfred DesRochers (1901-1978), lors d'une conférence qu'il a donnée à Montréal en 1954 :
«[...] j'ai connu, plus ou moins intimement, neuf sur dix. j'oserais dire, de tous les poètes canadiens-français vivants entre 1926 et 1954. Je dois ce plaisir d'abord à M. Alphonse Désilets, secrétaire, puis président, de la Société des Poètes, qui invitait chez lui quiconque avait commis quelques vers passables, jeunes ou vieux, traditionnalistes ou innovateurs. Cet excellent poète, dont les meilleures réussites restent, hélas ! inédites, fut, à Québec, la contre-partie de Clémence Isaure à Toulouse. Sans en utiliser le nom, il a créé de véritables Jeux Floraux. C'est avec plaisir et un profond sentiment de reconnaissance que je lui ai dédié À l'Ombre de l'Orford et je n'ai jamais posé de geste dont je sois le plus fier. Aujourd'hui même, approchant, si je ne me trompe, les 70 ans, il est encore tout feu, tout flamme pour la poésie, les arts et toutes les autres manifestations qui font la grandeur réelle d'un peuple ».
(Source : Quarante ans de poésie, conférence d'Alfred DesRochers donnée le 20 avril 1954 à l'hôtel Ritz-Carlton, sous les auspices du Club musical et littéraire de Montréal. Le texte intégral de la conférence a été publié dans Huit conférences. Saison artistique 1953-1954, volume B-4, Montréal, Cercle musical et littéraire de Montréal, 1954, p. 111-133).
(Source : Quarante ans de poésie, conférence d'Alfred DesRochers donnée le 20 avril 1954 à l'hôtel Ritz-Carlton, sous les auspices du Club musical et littéraire de Montréal. Le texte intégral de la conférence a été publié dans Huit conférences. Saison artistique 1953-1954, volume B-4, Montréal, Cercle musical et littéraire de Montréal, 1954, p. 111-133).
Le poème Pauvre vieille demeure ! a été publié en 1913 dans le recueil Mon Pays, mes Amours, d'Alphonse Désilets. (cliquer sur l'image pour l'agrandir) |
Dédicace manuscrite d'Alphonse Désilets dans son recueil Mon Pays, mes Amours. (Collection Daniel Laprès ; cliquer sur l'image pour l'agrandir) |
Mon grand père Emile Ripert poète de la Provence a connu Alphonse Desilets en 1924
RépondreSupprimeret j'ai un ouvrage de lui dédicacé à mon grand Père
je vous mets ci dessous 2 poésies une d'Alphonse Désilets et une d'Emile Ripert qui sont très jolies
Véronique Ripert
A un arbre
J’entends battre ton cœur et chanter ta ramure
Dans l’ivresse des airs,
Et pour savoir s’ils ont conservé ton murmure,
Et pour mieux comparer ton chant à leur mesure,
Je te chante mes vers…
Et peut-être qu’un jour, quand, abattu toi-même
Par le grand bucheron,
Arbre, tu ne seras qu’un peu de cendre blême,
Alors-car rien parfois ne vit plus qu’un poème-
Mes vers te recréeront ;
Et tu seras debout, bel arbre, dans mon livre
Aux rameaux toujours verts,
Et ton chant, qui, depuis notre enfance m’enivre
On l’entendra toujours à toi-même survivre
Quand on lira mes vers.
Emile Ripert
---------------------------------------------------
Ronde des fleurs qui ne faneront pas…
Les roses que tu m’as données
Depuis longtemps seront fanées,
Mais dans mon cœur, de jour en jour,
Croitront les fleurs de mon amour.
Les roses que tu m’as données
Depuis longtemps seront fanées,
Mais dans mon cœur, pour te bénir
Vivront les fleurs du souvenir
Et malgré l’âge et les années,
Malgré l’effort des destinées,
Tant que luira le jour vainqueur,
Je conserverai dans mon cœur
Les roses que tu m’as données….
Alphonse Desilets
le site Internet de mon grand père www.emile-ripert.eu